« Machine à voter = machine à tricher » : l'opposition a manifesté vendredi dans le calme en RDC, affichant sa crainte de fraudes dans les élections de décembre, qui marqueront le départ de Joseph Kabila après 18 ans au pouvoir.

À Kinshasa, capitale aux 12 millions d'habitants, quelques milliers de manifestants ont parcouru environ 7 km sur le boulevard Lumumba, l'une des principales artères de la ville, sans incident majeur.

Des militants des mouvements citoyens ont marché aux côtés des acteurs politiques et de leurs partisans.

Les opposants se sont mobilisés dès la matinée dans la capitale et dans plusieurs grandes villes de République démocratique du Congo (RDC) pour protester en particulier contre le système de vote prévu le 23 décembre lors des scrutins présidentiel, législatifs et provinciaux.

Si ces marches ont été autorisées par le pouvoir, elles étaient très encadrées par des policiers déployés en nombre aux points stratégiques de Kinshasa, Goma, Bukavu dans l'est, Bunia, Mbandaka, ont constaté des correspondants de l'AFP.

Aucun incident n'a été signalé. Les marches ont par contre été interdites à Kananga et à Mbuji-Mayi et à Kisangani.

À Kinshasa, où ils étaient particulièrement nombreux, les manifestants scandaient : « Machine à voter = machine à tricher », « Combattants jusqu'à la mort », a constaté une journaliste de l'AFP.

Participaient à la marche les candidats à la présidentielle Martin Fayulu, Vital Kamerhe, Freddy Matungulu, Marie-Josée Ifoku, Théodore Ngoy et l'opposant Adolphe Muzito qui n'a pas pu se présenter.

« C'est une démonstration de force du peuple congolais qui refuse la machine à voter, qui refuse le fichier électoral corrompu et vient dire non à une parodie électorale », a déclaré Vital Kamerhe.

« La CENI (commission électorale nationale indépendante) doit comprendre qu'aujourd'hui, le peule a repris son pouvoir souverain » et s'est exprimé « contre la machine à voter », a ajouté Marie-Josée Ifoku, la seule femme candidate à la présidentielle.

Pas de boycottage

Les machines à voter sont censées permettre techniquement aux électeurs de choisir leur candidat et imprimer leur bulletin dans les bureaux de vote le 23 décembre, selon la CENI.

L'opposition considère que ces machines, de fabrication sud-coréenne, vont favoriser la fraude lors de ces élections qui doivent notamment désigner le successeur du président Kabila dans un pays qui n'a jamais connu de transition pacifique depuis son accession à l'indépendance en 1960.

Les manifestations visaient aussi à obtenir de la commission électorale la radiation de plus de dix millions d'électeurs inscrits sans empreintes digitales dans le fichier électoral.

Joseph Kabila, au pouvoir depuis l'assassinat de son père en 2001, élu en 2006, avait été réélu dans la contestation en 2011. La Constitution, qu'il a lui-même promulguée, lui interdit de se représenter.

Cette journée de mobilisation est organisée au lendemain d'une réunion en Afrique du Sud de l'opposition qui s'est engagée à « ne pas boycotter » les élections et à désigner d'ici le 15 novembre un candidat commun, en promettant de ne pas permettre « la tenue de toute parodie d'élections ».

Parmi les sept formations impliquées figurent celles des ténors Félix Tshisekedi, en course pour la présidentielle au nom du parti historique d'opposition de l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), de l'opposant en exil Moïse Katumbi et de l'ancien chef de guerre Jean-Pierre Bemba qui ont vu tous deux leur candidature rejetée.

L'union n'était toutefois pas tout à fait de mise ce vendredi, le parti de Félix Tshisekedi ayant décidé qu'il « ne participera pas à cette marche », a déclaré à l'AFP son secrétaire général, Jean-Marc Kabund.

De son côté l'ancien vice-président Bemba, écarté de la présidentielle, a invité à manifester pour empêcher le pouvoir et la CENI « de mettre en place la plus grande fraude électorale avec une affaire de machine à voter qui n'a jamais été testée nulle part dans le monde ».

Et Moïse Katumbi, empêché de déposer son dossier de candidature à la présidentielle par les autorités, selon lui, a déclaré dans une vidéo largement partagée sur les réseaux sociaux : « Marchons massivement pour dire NON à la machine à voter et NON au fichier corrompu ! ».