Le président congolais Denis Sassou Nguesso a annoncé mardi à Brazzaville son intention d'avancer au premier trimestre 2016 l'élection présidentielle, un mois et demi après avoir promulgué une nouvelle constitution l'autorisant à briguer un troisième mandat.

«Le Conseil des ministres sera rapidement amené à convoquer le corps électoral plus tôt que prévu, afin que l'élection présidentielle se tienne dans le courant du premier trimestre de l'année 2016», a déclaré M. Sassou Nguesso lors d'un discours devant les deux chambres du Parlement réunies en congrès.

Aux termes de la Constitution, la prochaine présidentielle doit avoir lieu en juillet, mais M. Sassou Nguesso a justifié sa volonté d'anticiper le scrutin par la nécessité de mettre en oeuvre «la nouvelle dynamique» institutionnelle.

«Je comprends parfaitement votre volonté ainsi que votre exigence de voir s'instaurer au plus vite une nouvelle dynamique dans le pays consécutive au vote de la nouvelle Constitution. Accélérer la marche du Congo sur le chemin de son développement est un souci partagé par tous. Le renouvellement des institutions de la république participe de cette accélération», a-t-il déclaré.

«J'ai demandé au ministre de l'Intérieur d'élaborer un avant-projet de loi électorale qui définit les nouvelles dispositions sur la préparation, l'organisation et le déroulement des élections dans notre pays», a ajouté le chef de l'État.

La nouvelle Constitution a été adoptée lors du référendum du 25 octobre, dont l'opposition a rejeté les résultats comme une «tricherie», après une campagne marquée par des violences meurtrières.

Elle a fait sauter les deux verrous interdisant à M. Sassou Nguesso - qui cumule plus de 31 ans à la tête du Congo - de se représenter en 2016 : la limite d'âge et celle du nombre des mandats.

Période transitoire

La nouvelle loi fondamentale prévoit aussi plusieurs changements majeurs dans l'organisation politique du pays, en instituant notamment un exécutif bicéphale, avec un président chef de l'État et un premier ministre chef du gouvernement (alors que sous le régime de l'ancienne constitution, le président cumule ces deux fonctions) et un statut de l'opposition politique.

Si la nouvelle Constitution est entrée en vigueur à sa promulgation le 6 novembre, le pays traverse actuellement une période transitoire, avec des institutions issues de l'ancienne loi fondamentale qui ne sont plus adaptées au nouveau cadre constitutionnel. Aux termes de la nouvelle Constitution par exemple, le gouvernement doit être responsable devant le Parlement et ses membres nommés par le président, sur proposition du premier ministre qui détermine, «en concertation avec le Président (...) la politique économique et sociale de la Nation».

Selon une source gouvernementale, l'adaptation du pays aux nouvelles institutions nécessite la réécriture d'un certain nombre de lois pour les rendre conformes à la nouvelle Constitution. En cherchant à avancer la date de la présidentielle, M. Sassou veut accélérer la transition constitutionnelle, ainsi qu'il l'a expliqué aux députés.

Mais pour Honoré Sayi, député de l'Union panafricaine pour la démocratie sociale (UPADS), premier parti de l'opposition, l'annonce de M. Sassou Nguesso devant les élus est la «chronique d'une actualité presque déjà annoncée», même si le président n'a jusqu'ici pas dit qu'il serait candidat à sa succession.

«Vu le temps imparti, est-ce que nous aurons toute la latitude de mener la campagne et avec quels moyens?» s'est-il interrogé, émettant des craintes sur «l'objectivité» et «la transparence» de la présidentielle.

Né en 1933, M. Sassou Nguesso a dirigé le Congo - petit pays d'Afrique centrale de 4,4 millions d'habitants dont le pétrole est la principale source de richesse - à l'époque du parti unique, de 1979 jusqu'aux élections pluralistes de 1992, qu'il a perdues. Il est revenu au pouvoir à la fin de la guerre civile en 1997 avant d'être élu président en 2002 et réélu en 2009.