Des centaines de jeunes Soudanais ont manifesté dimanche à Khartoum dans le cadre d'une journée nationale de protestation antigouvernementale, malgré un important déploiement des forces de sécurité, a constaté un journaliste de l'AFP.

Plusieurs dizaines de personnes ont été arrêtées, et le président Omar el-Béchir a limogé un directeur d'université. Selon l'opposition, les affrontements ont fait cinq blessés.

Ces manifestations ont eu lieu le jour de l'annonce premiers résultats préliminaires complets du référendum au Sud-Soudan, qui ont confirmé le raz-de-marée en faveur de la partition, une perspective assez mal vécue dans le Nord.

La séparation annoncée, ajoutée aux difficultés économiques croissantes et à l'inquiétude sur l'évolution du régime islamiste de Béchir après l'indépendance du Sud non-musulman, a provoqué de nombreuses manifestations ces dernières semaines.

Mais ces mouvements sont restés sporadiques, les forces de sécurité maintenant un contrôle étroit de la société.

À Khartoum, des centaines de jeunes ont manifesté près du palais présidentiel en scandant «Nous voulons du changement! Non aux prix élevés!».

Près du centre-ville, à la faculté de médecine, les services de sécurité ont tenté d'empêcher environ 300 manifestants de quitter le campus. Ces derniers ont cependant réussi à se répandre dans les rues aux cris de «Révolution contre la dictature!».

Mais la police les a attaqués à coups de bâtons, procédant à plusieurs arrestations et forçant les étudiants à réintégrer le campus. Un bref communiqué de l'agence officielle Suna a annoncé peu après le limogeage du directeur de l'université, Mustafa Idris el-Béchir.

Dans la soirée, les forces de sécurité, dont 20 camions de police, ont été déployées en force autour du complexe universitaire. Selon des étudiants, elles ont fait usage de gaz lacrymogènes.

Devant l'Université islamique d'Omdurman, ville qui jouxte Khartoum, un millier de manifestants ont défilé en scandant des slogans hostiles au président Béchir, face à de nombreux policiers antiémeutes.

Des manifestants ont jeté des pierres en direction des policiers, qui ont répliqué à coups de bâtons. Des étudiants proches du pouvoir se sont parfois joints aux policiers, selon un témoin.

À l'université Al Ahlia d'Omdurman, une autre manifestation a rassemblé environ 500 étudiants autour des mêmes slogans.

Dans la ville d'El-Obeid, à 600 km à l'ouest de Khartoum, la police a fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser 600 manifestants qui défilaient dans le centre-ville en réclamant un changement de régime, selon un témoin.

Dans un communiqué, le parti d'opposition Umma a diffusé le nom de plus de quarante personnes arrêtées en lien avec les manifestations. Mais une source policière a évoqué 64 arrestations.

De son côté, le chef de l'opposition soudanaise Yassir Arman a dénoncé l'«agressivité» des forces de sécurité contre les manifestations et demandé la fin du règne du parti unique dans le Nord du pays.

Les autorités ont imposé de fortes restrictions à la presse. Trois journalistes ont été arrêtés, dont l'un dans son bureau, selon un confrère.

Un photographe de l'AFP a été détenu par des soldats pendant deux heures, tandis qu'une dizaine de journalistes ont reçu l'ordre de ne pas couvrir les manifestations.

Les manifestants répondaient à des appels lancés via Internet pour une journée de protestation antigouvernementale pacifique à travers tout le pays, un appel similaire à celui qui a déclenché les manifestations massives en Egypte.

«Ce que nous avons vu en Egypte a inspiré la jeunesse», a déclaré à l'AFP Mubarak al-Fadl, membre d'Umma.