Malgré des appels de la communauté internationale à reporter les élections législatives boycottées par l'opposition, le président nigérien a maintenu le scrutin entraînant la suspension du Niger de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest.

Les législatives ont débuté mardi à 07H45 locales (1H45 HAE), en dépit des appels de l'Union africaine (UA), de la Cédéao et de l'Union européenne (UE) à les reporter pour renouer le dialogue politique entre le président Mamadou Tandja et l'opposition qui depuis des mois dénonce un «coup d'état» constitutionnel du chef de l'État. La Cédéao n'avait pas encore diffusé à la mi-journée de communiqué officiel mais, interrogé par l'AFP sur une suspension effective du Niger à partir de mardi, le président de la commission de l'organisation régionale, Mohamed ibn Chambas, a répondu par sms: «Tout à fait. La résolution prise lors du sommet de samedi était claire et précise».

Samedi à Abuja, la Cédéao avait pris des sanctions limitées contre Niamey (interdiction de présenter des nationaux à des postes dans des organisations internationales et d'accueillir des réunions de la Cédéao), mais surtout avait averti que les sanctions deviendraient «pleines et automatiques» si M. Tandja persistait à organiser le scrutin, boycotté par l'opposition.

Les six millions d'électeurs inscrits doivent choisir les 113 députés du Parlement que Mamadou Tandja avait dissous en mai pour faire passer son projet de référendum constitutionnel. Cette consultation, organisée le 4 août, a permis au chef de l'État, au pouvoir depuis dix ans, d'obtenir une prolongation de trois ans de son mandat et de rester à ce poste jusqu'en 2012.

Aux législatives mardi, il y avait bien quelques candidats indépendants, mais la vingtaine de formations en lice étaient pour la plupart proches du régime.

Selon plusieurs observateurs et des médias indépendants nigériens, la participation semblait assez faible en milieu de journée, notamment à Niamey, comme a pu le constater l'AFP.

Au bureau de vote 47 de Gamkalé, à la périphérie sud de la capitale, la pile de bulletins de la douzaine de candidats en lice est restée quasi-intacte. À 9H00 locales, deux heures après le début du vote, on ne pouvait voir que deux enveloppes dans l'urne transparente dans ce bureau où 500 électeurs sont inscrits.

À Agadez (nord), où les rebelles touareg ont récemment déposé les armes, la radio a fait état de l'absence des délégués de certains partis politiques.

Des radios privées évoquaient également une participation timide dans les villes de Maradi et Zinder (est), Dosso (sud-ouest), Tahua (ouest) et Tillaberi (su-ouest).

La radio d'État nigérienne a pour sa part assuré que les opérations se déroulaient «dans le calme» et a exhorté les électeurs à «sortir massivement accomplir leur devoir de citoyen».

L'ancien colonel Tandja a voté tôt mardi à la mairie de Niamey, souhaitant «des élections équitables et transparentes» et paraît déterminé à aller jusqu'au bout malgré les pressions.

Lundi l'UE, gros bailleur de fonds du Niger, avait demandé le report du scrutin et surtout mis en garde sur son «impact négatif sur les relations du Niger avec l'Union européenne».

En clair l'Union pourrait éventuellement activer l'article 96 des Accords de Cotonou, un document de coopération et de développement signé en juin 2000 au Bénin entre l'UE et les pays dits ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique). Cet article prévoit la possibilité d'une suspension de la coopération communautaire en cas de non respect de critères démocratiques et de défense des droits de l'Homme.

Quant à la France, ex-puissance coloniale qui a des intérêts stratégiques au Niger avec l'uranium exploité par Areva, son président Nicolas Sarkozy avait jugé dès juillet que «la démocratie et les institutions (étaient) aujourd'hui directement menacées».