(Los Angeles) Pas de sujets tabous, prévient la Maison-Blanche, y compris la prochaine présidentielle au Brésil : le président américain Joe Biden aura jeudi sa première réunion bilatérale avec son homologue Jair Bolsonaro, et elle promet d’être délicate.

« Je m’attends à ce que le président aborde le sujet d’élections ouvertes, libres, justes, transparentes et démocratiques », a déjà dit le principal conseiller diplomatique de la Maison-Blanche, Jake Sullivan, à bord d’Air Force One.

Premier tête-à-tête

Il s’agira du premier tête-à-tête entre le démocrate de 79 ans et le chef d’État d’extrême droite de 67 ans, et il aura lieu en marge du Sommet des Amériques se tenant actuellement à Los Angeles.

Washington s’inquiète des virulentes attaques de Jair Bolsonaro, qui brigue un nouveau mandat, contre le système électoral au Brésil, comme s’il préparait déjà la contestation d’un résultat défavorable.

« Il n’y a aucun sujet qui soit exclu quelle que soit la réunion bilatérale du président » américain, a dit Jake Sullivan, répondant à des informations dans la presse selon lesquelles Jair Bolsonaro aurait fait une liste de sujets à ne pas aborder lors de la rencontre.

Le sujet des élections est évidemment particulièrement sensible pour Joe Biden : sa propre victoire électorale en 2020 fait l’objet d’une contestation sans relâche et sans fondement de son adversaire, l’ancien président Donald Trump.

« Douteuses »

Comme pour jeter encore de l’huile sur le feu, Jair Bolsonaro vient d’ailleurs d’émettre lui-même des doutes sur la dernière élection présidentielle américaine.

« Je ne vais pas entrer dans les détails à propos d’une autre nation souveraine. [Donald] Trump était très bien. Et nous avons vu un certain nombre de choses qui nous semblent douteuses, » a-t-il dit, évoquant des électeurs qui auraient voté plusieurs fois aux États-Unis.

« Nous ne voulons pas que cela arrive au Brésil », a déclaré le dirigeant d’extrême droite, distancé dans tous les sondages par Lula, vétéran de la gauche brésilienne et lui-même ancien président.  

Pour Benjamin Gedan, directeur des études sur l’Amérique latine au Woodrow Wilson International Center for Scholars, les attaques de Jair Bolsonaro contre le système électoral sont « vraiment inquiétantes ».  

Mais pour autant, il estime qu’une rencontre bilatérale « n’est pas problématique en soi […]. Il faut que les dirigeants des deux plus grands pays du continent se parlent. »

Le chercheur rejette en particulier toute comparaison avec une rencontre, encore hypothétique, entre Joe Biden et le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, faisant valoir notamment que le président brésilien était lui « démocratiquement élu ».

Amazonie

Autre sujet potentiellement délicat pour la rencontre à Los Angeles : l’environnement, puisque Jair Bolsonaro est ouvertement climatosceptique.

Jake Sullivan assuré que « le climat [serait] un sujet de conversation important. »

« Nous pensons que cela peut-être un vecteur de progrès dans la relation entre les États-Unis et le Brésil, en particulier autour d’actions concrètes pour protéger la forêt amazonienne », a-t-il dit.

Après des décennies de déforestation pour faire place au bétail et à l’agriculture, le « poumon vert » de la planète pourrait être proche, selon certains experts, d’un point de non-retour climatique, au-delà duquel la libération de CO2 et de méthane serait inéluctable.  

Passé ce seuil critique, une partie de l’Amazonie se transformerait en savane.