(Bruxelles) La guerre en Ukraine ne doit pas faire oublier aux Européens la nécessité d’aider les déplacés et réfugiés au Sahel qui fuient les violences et sont exposés à l’insécurité alimentaire, a plaidé mardi la directrice du bureau régional du HCR pour l’Afrique de l’Ouest et centrale.

Présente à Bruxelles pour rencontrer des responsables européens, Millicent Mutuli a alerté sur l’accélération et l’expansion des déplacements de populations dans les pays du Sahel, alors que les attaques de groupes djihadistes se sont étendues.

« Ce qui est inquiétant c’est de voir que […] les régions du nord du Togo, du Bénin et de la Côte d’Ivoire sont désormais affectées par des attaques sur des cibles comme des postes de police, mais aussi par des déplacements de population », a-t-elle déclaré à l’AFP.

Mme Mutuli veut obtenir de l’UE « un engagement qu’elle continuera à porter son attention sur la région d’Afrique centrale et du Sahel », et à y consacrer des fonds, même si les yeux sont actuellement tournés vers l’Ukraine, avec plus de huit millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays et 6,9 millions réfugiées à l’étranger.

Depuis 2015, les déplacements forcés de population en Afrique de l’Ouest et centrale ont presque quadruplé. Dans cette région 7,4 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur de leur pays et 1,6 million sont réfugiées ailleurs, selon des données du HCR de janvier. Pour le seul Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, et Tchad) les déplacés se montent à 4,7 millions de personnes.

Les populations sont poussées pour des raisons de sécurité à quitter les zones rurales pour s’installer dans des centres urbains, a souligné la responsable, citant comme exemple de ce phénomène les villes de Kaya et Dori, dans le nord du Burkina Faso. À la différence des plus âgés, les jeunes de 20 à 30 ans qui s’installent en ville ne comptent pas revenir dans les villages, a-t-elle indiqué.

L’aide à fournir à ces populations doit donc notamment se concentrer sur la formation professionnelle, afin que les jeunes puissent travailler, a-t-elle dit.

Elle a pointé le risque de voir grossir les mouvements migratoires dans la région et vers l’Europe « si aucune réponse n’est apportée aux besoins immédiats de ces populations vulnérables ».

Mme Mutuli a souligné que l’impact de la crise alimentaire qui affecte en particulier le Tchad est encore plus fort pour les réfugiés. « Nous avons besoin de moyens pour la production alimentaire près des camps de réfugiés », a-t-elle dit.

Et le blocus des ports ukrainiens qui empêche les exportations de céréales de ce grand pays producteur menace particulièrement les réfugiés et déplacés, car « dès l’instant où il y a une pénurie, cela crée des tensions avec les populations locales ».