(La Haye) Le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI) a défendu lundi sa décision de ne pas inclure les États-Unis dans une enquête sur l’Afghanistan, affirmant que les « pires crimes » y ont été commis par les talibans et le groupe État islamique (EI).

« J’ai pris la décision, en me basant sur des preuves, que les pires crimes en termes de gravité, d’échelle et d’étendue semblent être commis par l’État islamique-Khorasan (EI-K) et par les talibans », a déclaré Karim Khan durant une réunion des pays de la CPI.

« J’ai dit que je prioriserais ceux-ci et j’ai demandé aux juges l’autorisation de mener ces enquêtes », a ajouté le procureur britannique.

Plusieurs organisations de défense des droits humains avaient critiqué la décision de M. Khan en septembre d’écarter des priorités l’enquête sur les forces américaines pour se concentrer à la place sur les talibans et leurs adversaires de l’EI-K.

L’ouverture d’une enquête de la CPI en Afghanistan, notamment sur des crimes présumés commis par des soldats américains, avait conduit l’administration de l’ancien président américain Donald Trump à imposer des sanctions à la prédécesseure de M. Khan, Fatou Bensouda.

Celle-ci avait demandé en 2017 aux juges internationaux l’autorisation d’ouvrir une enquête complète, estimant qu’il existait des soupçons « raisonnables » de crimes de guerre commis tant par les talibans que par les forces américaines en Afghanistan et la CIA dans des centres de détention secrets à l’étranger.

L’investigation avait été suspendue en 2020, le gouvernement —désormais renversé— de Kaboul ayant assuré qu’il tenterait d’enquêter lui-même sur les allégations de crimes de guerre.

Mais le changement de régime à Kaboul a poussé M. Khan à demander de relancer l’enquête, estimant que la prise de pouvoir des talibans signifiait que les crimes de guerre ne seraient plus examinés correctement.

Les États-Unis ne sont pas signataires du traité ayant permis la constitution de la CPI, créée en 2002 pour juger les pires atrocités dans le monde.  

M. Khan a également assuré lundi que le coup d’État au Soudan avait « provoqué une certaine interruption » des travaux de la CPI, mais qu’il s’attendait à ce que son équipe puisse y revenir prochainement pour enquêter sur les crimes de guerre.

M. Khan s’est rendu à Khartoum en août pour signer un accord de coopération visant à faire avancer le procès pour génocide de l’ex-dictateur Omar el-Béchir.

« L’heure du changement a sonné » à la CPI, a-t-il ajouté, réitérant ses promesses antérieures de se concentrer sur les affaires ayant des chances d’aboutir à une condamnation.