Le candidat républicain à la Maison-Blanche, Donald Trump, dit que l'ALENA a été une bien bonne affaire pour le Mexique, mais une catastrophe pour les États-Unis. Que lui répondez-vous ?

Ce n'est pas vrai, les trois pays ont bénéficié de l'entente. Des études démontrent que six millions d'emplois aux États-Unis dépendent de l'ALENA. Beaucoup d'entreprises américaines, comme Ford, peuvent continuer à exister grâce à leur collaboration très forte avec le Canada ainsi qu'avec le Mexique. Sur le plan de la productivité et de la compétitivité avec les autres régions du monde, notamment l'Asie, l'ALENA a aussi joué un rôle majeur, puisque maintenant, les trois pays travaillent ensemble. C'est vrai que ces dernières années, ces avantages ont été quelque peu grugés par les bas prix de l'énergie. Dans l'ensemble, les échanges commerciaux entre les trois pays ont triplé depuis son entrée en vigueur en 1994. En 2015, ces échanges s'élevaient à 1000 milliards. L'ALENA est de loin le projet le plus ambitieux, et le plus réussi, des Amériques.

Comment vous préparez-vous au lendemain de l'élection présidentielle américaine ?

Aujourd'hui, les Mexicains ne peuvent plus se concevoir sans l'Amérique du Nord. On s'est longtemps conçus comme Mexicains et Latino-Américains, mais aujourd'hui, nous sommes aussi très Nord-Américains. De plus, plus de 30 millions de personnes d'origine mexicaine vivent aux États-Unis. Pour toutes ces raisons, les résultats de l'élection américaine seront très importants pour nous. D'autant que les Mexicains ont été très vexés par les propos de l'un des candidats, qui utilise sans arrêt le Mexique comme prétexte. 

Après les élections, le Canada et le Mexique devront travailler ensemble pour plaider auprès du nouveau président américain, quel qu'il soit, l'importance de travailler ensemble, l'ampleur des échanges entre nos trois pays et le besoin pour une migration plus intelligente. Nous avons besoin de programmes migratoires qui profitent à tous, comme le programme des travailleurs temporaires mis en place ici. Il y a aujourd'hui 23 000 travailleurs mexicains qui viennent au Canada, et ça a beaucoup de succès. Ils reviennent au Mexique avec de nouvelles connaissances. On doit étendre ça à d'autres secteurs, comme ceux de la construction, de la gastronomie et dans les secteurs qualifiés. Et ce n'est pas une migration dans un seul sens. Plus de travailleurs canadiens et américains devraient travailler au Mexique.

Tournons-nous vers la relation canado-mexicaine. Le 1er décembre, les Mexicains n'auront plus besoin d'un visa pour venir au Canada. À quoi doit-on s'attendre ?

Il y aura certainement une hausse dans le tourisme mexicain au Canada. Après l'imposition d'un visa [par le gouvernement Harper], le nombre de touristes mexicains au Canada a chuté à 200 000 personnes par année. Et le nombre d'étudiants mexicains a chuté des deux tiers. On peut s'attendre à ce que la situation se rétablisse. Je pense aussi que plus de gens d'affaires viendront au Canada. Cette invitation à entrer va dans les deux sens. Au Mexique, nous avions limité l'importation de la viande canadienne. On a levé ces contraintes, et vous pouvez exporter depuis le 1er octobre. Vous pouvez aussi exporter le porc de chez vous. Les relations canado-mexicaines sont de retour. Le Canada est de retour. Je ne sais pas si vous en êtes conscients, mais en ce moment, le Canada est un exemple dans le monde entier. Notamment, le message sur la parité des sexes au sein du gouvernement est très fort. C'est une inspiration au Mexique.

L'ALENA EN BREF

MEMBRES : Canada, États-Unis, Mexique

ENTRÉE EN VIGUEUR : janvier 1994

PRINCIPAL OBJECTIF : élimination des tarifs

ÉCHANGES NORD-AMÉRICAINS : 1000 milliards annuellement