L'image de carte postale de Rio qui lui a entre autres permis de gagner l'organisation des Jeux olympiques en 2016 a été écornée au cours des dernier jours, avec les nouveaux développements dans la guerre contre les trafiquants de drogue. Surnommée la «ville merveilleuse» pour ses plages, son soleil et sa nature exubérante, Rio montre son visage «tragique» et l'étendue du défi nécessaire pour restaurer la sécurité.

Les images d'un hélicoptère de la police en flammes, abattu le week-end dernier par des trafiquants de drogue à un jet de pierre du mythique stade du Maracana ont fait le tour de la planète.  Monté au créneau dès lundi, le président Luiz Inacio Lula da Silva a promis de «nettoyer la saleté» qui gangrène la seconde ville du Brésil.

Des centaines de policiers traquent depuis le début de la semaine les auteurs des tirs contre l'hélicoptère dans de nombreuses favelas où les habitants terrorisés se retrouvent sous les feux croisés de la police et des narcotrafiquants. En six jours, la guerre du trafic a déjà fait 33 morts.

Des membres du Comité international Olympique ont réitéré leur confiance en la «capacité de Rio d'organiser des JO sûrs», rappelant que Londres avait été frappé par une vague d'attentats terroristes (52 morts) en juillet 2005, au lendemain du choix de la ville pour accueillir les JO de 2012.

Néanmoins, le doute plane sur la compétence réelle des autorités à vaincre ce fléau dans une ville où un tiers des six millions d'habitants vit dans plus de mille favelas.

Le pouvoir parallèle des trafiquants «fait exploser les piliers de la République. Jusqu'à quand ?», s'interroge le président de l'Ordre des avocats du Brésil (OAB), Cezar Britto.

Les homicides font près de 6000 victimes par an dans l'État de Rio qui compte quelque 14 millions d'habitants, dix fois plus qu'à New York ou huit fois plus que dans toute la France.

Depuis 2007, «les homicides ont chuté de 45 pour 100 000 habitants à 33. C'est un chiffre encore élevé mais il n'y a pas de solution magique», a déclaré à l'AFP le secrétaire à la sécurité de l'État, José Mariano Beltrame.

«Notre objectif est de ramener la criminalité à des niveaux tolérables, comme dans les pays industrialisés», a-t-il ajouté, soulignant qu'au cours des trente dernières années pratiquement rien n'avait été fait pour combattre le crime organisé.

Depuis l'année dernière, cinq favelas ont été «pacifiées» avec une police communautaire qui les occupe en permanence. Ce programme de pacification, qui va de pair avec des investissements massifs pour réhabiliter les favelas les plus violentes, sera étendu d'ici à 2016 à une centaine de ces communautés.

Mais, pour l'instant, cette pacification a pour effet de faire migrer les narcotrafiquants vers d'autres favelas.

«La police reconquiert des territoires occupés par les trafiquants et il y a une violente réaction de leur part», a déclaré à l'AFP Alba Zaluar, professeur au Centre d'études sur la violence à l'Université de Rio (Uerj).

Dans ce pays de 8,5 millions de km2 aux frontières mal surveillées, il est facile de faire entrer des armes et de la drogue, selon elle. De plus, la police de Rio, mal formée, mal payée est souvent corrompue.

Mais, pour l'expert, seule «la coopération des polices et de l'armée pourra améliorer la situation».

Outre les forces armées, il existe trois forces de sécurité dans le pays: la police fédérale et les polices militaire et civile de chacun des 27 États. Lula s'était engagé en 2002 à réformer la Constitution pour permettre l'unification des polices civile et militaire. Une promesse qui dort encore dans les cartons.