Maison intelligente, médecine anti-vieillissement révolutionnaire, voiture pouvant accueillir une marchette, système de surveillance pour les enfants inquiets de leurs parents, les «nouveaux vieux» font carburer les penseurs du marketing. Survol de quelques nouveautés.

La maison du 21e siècle

Voilà une quinzaine d'années, Charlie Hillman habitait à côté de sa dernière grand-tante, au nord de Milwaukee. Alerte malgré ses 80 ans bien sonnés, elle lui rendait visite chaque jour. Mais un beau matin, elle lui a téléphoné pour qu'il passe la voir: il faisait trop froid chez elle. M. Hillman s'est vite rendu compte que toutes les fenêtres étaient ouvertes, pour évacuer la fumée qui s'échappait de la fournaise en flammes!

 

«Ce jour-là, Charlie a compris qu'il fallait absolument mieux informer les proches des personnes âgées des conditions dans lesquelles elles vivent», explique Laura Mitchell, responsable du développement des affaires chez Grand Care, la compagnie fondée par M. Hillman. «Il n'en revenait pas d'être passé si proche de perdre sa grande-tante alors qu'elle vivait à côté.»

Traditionnellement, on décrit la «maison du 21e siècle» comme un paradis où la plupart des tâches domestiques - acheter du lait, passer l'aspirateur, faire fonctionner la lessiveuse - sont automatisées. Mais dans l'esprit de M. Hillman, l'objectif était plutôt de surveiller les allées et venues des occupants de la maison pour s'assurer qu'ils vont toujours bien. Grand Care a mis sur le marché un système qui avertit les enfants ou les petits-enfants des personnes âgées quand ces dernières quittent la maison, ouvrent le frigo ou la pharmacie, et même si elles vont et viennent dans la maison. La compagnie a vendu quelques centaines de systèmes aux États-Unis, et quelques dizaines au Canada, à un prix moyen de 2500$US.

Suppléments controversés

Ce n'est pas la seule innovation destinée aux aînés. La «médecine anti-vieillissement» croît en effet à pas de géants. Du moins au chapitre des ventes, qui dépassaient 50 milliards$US l'an dernier, selon le New York Times.

Des milliers de personnes fréquentent les expositions annuelles de l'Académie américaine de médecine anti-vieillissement chaque décembre à Las Vegas. Et pourtant, aucun chercheur n'a jamais réussi à prouver dans une revue médicale que ces molécules, qui vont des crèmes aux hormones de croissance, donnent les résultats espérés, selon deux sommités montréalaises dans le domaine, Jude Poirier et Siegfried Hekimi, de l'Université McGill.

En 2007, l'immunologue François Marceau, de l'Université Laval, a démontré dans le British Journal of Dermatology que le DMAE utilisé dans les crèmes antirides efface bel et bien temporairement les rides, mais en éliminant la capacité des cellules d'évacuer leurs déchets, ce qui les fait gonfler et souvent mourir prématurément. «La seule chose qui semble fonctionner, du moins chez la souris et le singe, c'est le jeûne, dit le Dr Poirier. En consommant 40% moins de nourriture dès l'enfance, on parvient à allonger l'espérance de vie maximale de 30%. Mais le corps se met en mode de survie, et il n'y a pas d'énergie disponible pour les processus complexes, comme l'apprentissage intellectuel. Je doute que ce soit vraiment une avenue intéressante.»

Échapper aux résidences

Qui dit vieillesse, dit déracinement. Autrement dit, qu'une personne âgée s'installera inévitablement un jour dans une résidence. Rien n'est plus faux. Aux États-Unis, seulement 20% des personnes âgées de plus de 85 ans habitent dans un centre d'hébergement, et rien ne permet de croire que la situation est différente au Canada. Cependant, les personnes âgées ont tendance à s'installer dans des quartiers adaptés à leurs besoins.

Les autorités américaines de santé publique commencent à s'intéresser au phénomène «NORC», ces zones, allant d'un seul immeuble à quelques pâtés de maisons, où il y a de fortes concentrations de personnes âgées. Identifier ces zones permet d'y déployer des ressources adaptées - par exemple, des agences d'aide à domicile - et de modifier l'environnement urbain en conséquence, par exemple avec des feux pour piétons allongés.

Le Québec commence aussi à s'intéresser à cette approche, selon la gérontologue Marie Beaulieu, de l'Université de Sherbrooke, avec le programme «Villes amies des aînés», en partenariat avec l'Organisation mondiale de la santé.

L'âge d'or techno

Voici une liste d'innovations technologiques qui répondent au vieillissement de la population.

- Une demi-douzaine de constructeurs automobiles, surtout japonais, tentent de mettre au point un système permettant à une personne qui utilise une marchette ou une chaise roulante de s'installer seule au volant de sa voiture

- Le système QuietCare de AT&T utilise une dizaine de détecteurs de mouvements pour déterminer les habitudes d'une personne âgée à la maison; quand une journée sort de l'ordinaire, des proches sont avertis

- Intel étudie depuis une quinzaine d'années les habitudes des personnes âgées pour mettre au point un système de surveillance à distance

- La compagnie Home Guardian vend un senseur qui détecte les vibrations des pas. Quand ils deviennent hésitants ou que la personne âgée se traîne des pieds, cela peut être un symptôme d'arthrite mal contrôlée ou de Parkinson, et des proches en sont avertis

- Au Japon, près de 3000 personnes âgées utilisent le «i-pot», une bouilloire connectée à internet qui avertit leurs proches quand ils se font du thé

- Med-Time est un boîtier pour médicaments qui avertit quand il faut prendre une pilule; le système peut gérer 15 pilules avec 28 différents dosages quotidiens

- Loc8tor est un kit contenant sept étiquettes avec puces, qu'on attache aux objets qu'on risque de perdre (lunettes, clés); une manette lit les signaux des puces, jusqu'à une distance de 200 mètres