Beaucoup de talent et de pratique

Il n'y a pas de fumée sans feu et de bons dessinateurs sans direction artistique. Embauché comme premier artiste-dessinateur de La Presse en 1884, Albert-Samuel Brodeur devait reproduire au début les portraits des acteurs de l'actualité et des scènes de faits divers.

En quelques années, il a produit une quantité impressionnante d'illustrations. Cette pratique contraignante en a fait un maître en son domaine.

Doté d'une main sûre et d'un bon sens de l'observation, il dessinait de manière fluide et précise. Il reproduisait la réalité sans hésitation, ni invraisemblance dans l'anatomie ou le mouvement. Ses paysages étaient nets, respectant parfaitement la perspective.

La composition s'avérait soigneusement étudiée tout en étant d'un style contemporain. Les dessins s'enrichissaient de détails, sans être surchargés.

Albert-Samuel Brodeur aura certainement contribué à l'essor de La Presse des premiers temps, dont le tirage est passé de 7 000 à 100 000 exemplaires en 22 ans, soit de 1884 à 1896.

La pierre d'assise

Si bien qu'en 1903, il devient directeur artistique du journal. La Presse met davantage d'emphase sur son département d'illustration, avec Brodeur, comme guide, qui formera quantité d'autres artistes.

L'équipe Brodeur fera la renommée de La Presse au début du siècle dernier. Ils occuperont une place importante dans les pages du quotidien où Brodeur s'évertue à développer de nouveaux «produits» visuels au fil des ans.

C'est sous son règne que naîtra la caricature à La Presse;  l'utilisation systématique de l'illustration au quotidien; la couverture sportive dessinée (Nap Gervais et ses successeurs); les chroniques humoristiques illustrées, et surtout, les célèbres unes du supplément illustré du samedi.

Assumant toujours la tâche de directeur artistique, il demeure le dessinateur vedette du journal. Il a illustré les unes du samedi régulièrement tout en formant de brillants élèves comme Paul Caron,  Albéric Bourgeois et Georges Latour.

Après son départ, l'impulsion qu'il aura donnée au département d'illustration lui assure d'occuper une place prépondérante dans la production du journal.

Ce n'est qu'à la fin des années 1940, après la mort subite de son successeur Georges Latour, que l'on sentira un essoufflement de l'art de l'illustration dans les pages de La Presse.

***

Voyez quelques unes des meilleures oeuvres d'Albert-Samuel Brodeur assemblée dans un portefolio.

Ces premières pages de cahier publiées au début du XXe siécle illustrent des sujets d'actualité à l'époque. Ces pages étaient conçues comme des courts scénarios qui illustraient différents aspects d'un même thême, l'équivalent des infographies que nous publions dans nos journaux actuellement. Elles traitaient de plusieurs aspects: les problèmes de la vie urbaine, la politique ou les sports et loisirs, la plupart du temps sur un ton humoristique.

Vous pourrez découvrir la légende de Jos. Montferrand illustrée, les rêves et cauchemars d'un policien, une leçon de bienséance dans le tramway ou voir les automobiles à la mode en 1907 en cliquant ici.

N. B.: Malheuresement, bien que la plupart de ces pages aient été publiées en couleurs il y a plus de 100 ans, vous comprendrez qu'il a été impossible de trouver des originaux en état de reproduction. Nous avons dû partiellement faire cette galerie à partir de microfilms noir et blanc de cette époque.

>>> Voyez des oeuvres de Brodeur publiées dans d'autres publications en cliquant ici

Ce n'est pas d'hier que les déménagements posent problèmes dans la ville de Montréal. Dans cette page publiée en 1905, on peut voir la qualité du style de Brodeur. La posture des personnages est réaliste, l'architecture et la perspective précises, les détails sont sans pour autant surcharger l'image dans une composition recherché, le tout surmonté d'une typographie décorative très réussie.