La saga Rocky, dont un nouvel épisode sort mercredi aux États-Unis, a donné, depuis 40 ans, un éclairage bienvenu à Philadelphie et favorisé le tourisme dans cette ville américaine en pleine mutation.

Le couple place son caniche blanc aux pieds de la statue de bronze et le prend en photo, seul. Derrière eux, une dizaine de personnes attendent pour, elles aussi, être immortalisées à côté du boxeur Rocky.

Parmi elles, Agga Dharmma, un moine bouddhiste arrivé de Birmanie. Comme tous les autres, il assure ne pas être venu à Philadelphie «pour Rocky», mais il est tout de même là, en contrebas du musée d'art de la ville.

Cette statue, utilisée pour le tournage de Rocky III et offerte à la ville en 1982, est le monument le plus demandé à l'office du tourisme derrière la Liberty Bell, symbole de la naissance des États-Unis, affirme Anne McGuigan, qui y officie comme bénévole.

Sur son site, l'office du tourisme propose même un itinéraire balisé par les grands lieux immortalisés dans la saga.

La série «a positionné Philadelphie sur la carte du monde», assure à l'AFP Michael Nutter, le maire de Philadelphie.

«Tout le monde connaît Rocky» et les grands lieux du tournage, selon lui.

De Philadelphia à Trading Places, la ville de l'amour fraternel, selon son étymologie, a souvent été à l'honneur au cinéma. Mais «Rocky a mis en valeur Philadelphie comme aucun autre film», ajoute l'édile.

Dans la plus grande ville de Pennsylvanie, Rocky n'a pas que des amis. Certains y voient une caricature et ont parfois des mots durs pour Sylvester Stallone, scénariste et acteur des six premiers volets de cette épopée.

La fameuse statue, qui était initialement située sur le perron du musée d'art, a dû être déplacée. Une part non négligeable de la population estimait qu'elle n'avait pas sa place à l'entrée d'un musée.

Chez Pat's King of Steaks (vu dans Rocky), le spécialiste du Philly's Cheesesteak, un sandwich à la viande et au fromage, «90% de notre activité vient des touristes, mais ce n'est pas grâce au film», assure un vendeur.

Rocky a eu un impact, essentiellement positif, sur Philadelphie, son tourisme mais aussi au-delà.

«Quand le premier est sorti, cela a redonné de la fierté à la ville», se souvient Vince Giaccobi, qui a grandi à Philadelphie avant de s'installer en Arizona. Rocky incarnait bien cette cité de cols bleus, durs au mal, où le superficiel n'avait pas sa place.

La fiscalité mieux que Rocky

Aujourd'hui, Philadelphie est une ville qui bouge. Encore boudé il y a une dizaine d'années, le centre-ville a été redynamisé et bourgeonne de restaurants, de bars et de nouvelles constructions.

Le taux de grande pauvreté de Philadelphie reste le plus élevé parmi les dix principales villes des États-Unis (12%), mais l'activité économique est en plein élan.

«La ville a beaucoup changé. Elle est plus orientée vers la culture. Je pense que c'est un progrès», estime Vince Giaccobi.

Pour Craig Schelter, directeur exécutif du Development Workshop, une organisation qui se veut être une interface entre les pouvoirs publics et le secteur privé, c'est avant tout un abattement fiscal qui a donné le coup d'envoi du renouveau du centre-ville en 1997.

Ce dispositif a incité les promoteurs à investir massivement, en améliorant la qualité du bâti. En 2008, le géant américain du câble Comcast y a notamment inauguré son nouveau siège, un bâtiment de près de 300 m de haut.

M. Schelter souligne aussi le rôle moteur joué par les grandes universités de la ville, notamment Penn, Drexel et Temple, qui n'ont cessé de croître et de lancer de nouveaux projets.

La série de Sylvester Stallone «est un facteur» du développement de Philadelphie, «mais je ne sais pas si c'est un facteur majeur», tempère Craig Schelter.

Frank Kubach, lui, a une opinion différente. L'effet Rocky, il le ressent peut-être davantage que quiconque. Sa salle de boxe, le Front Street Gym, a servi de lieu de tournage pour Creed.

«Chaque fois qu'un Rocky sort, j'ai cinquante gamins qui débarquent à la salle.»