(Paris) En ce jour de présentation de la 48e cérémonie des Césars du cinéma français, cette industrie est éclaboussée par des actrices qui affirment avoir été victimes d’abus sexuels et physiques de la part de réalisateurs de plusieurs décennies plus âgés qu’elles.

Les médias français rapportent que Judith Godrèche prononcera un discours sur les violences sexuelles lors de la cérémonie des Césars qui sera retransmise en direct à la télévision. Elle a déjà envoyé un message fort au public à travers de récentes entrevues dans lesquelles elle dénonçait une « omerta » dans l’industrie.

Cette controverse survient alors que le cinéma français s’apprête à briller le mois prochain lors de la cérémonie des Oscars, aux États-Unis, avec le drame judiciaire de Justine Triet, Anatomie d’une chute.

Judith Godrèche, qui est âgée de 51 ans, est bien connue des cinéphiles français. Elle a récemment accusé deux réalisateurs de viol et d’abus sexuels alors qu’elle était adolescente. Elle a officiellement porté plainte au début du mois, selon ce qu’a confirmé le parquet de Paris.

Elle dénonce le réalisateur Benoît Jacquot, avec qui elle a entretenu une relation de six ans débutée alors qu’elle avait 14 ans, pour viol et violences physiques. Benoît Jacquot, un éminent réalisateur en France, est de 25 ans son aîné.

Elle accuse également un autre réalisateur, Jacques Doillon, d’abus sexuels alors qu’il réalisait un film alors qu’elle avait 15 ans. Doillon a 28 ans de plus qu’elle.

Les deux réalisateurs ont nié ces allégations.

S’exprimant sur France Inter plus tôt ce mois-ci, Mme Godrèche a déclaré qu’elle n’avait jamais été attirée par Jacquot, « mais je me suis retrouvée avec lui, dans son lit, et j’étais sa petite épouse ».

Judith Godrèche et Jacquot se sont rencontrés en 1986 sur le tournage de son film Les Mendiants. « J’étais endoctrinée, c’était comme si j’avais rejoint une secte », a-t-elle expliqué. La relation a été entachée de violence, de confinement et de contrôle. »

Judith Godrèche avait déjà parlé de sa relation avec Benoît Jacquot, sans le nommer, dans une émission télévisée autobiographique intitulée Icône du cinéma français sortie en décembre. Elle faisait partie des actrices qui se sont prononcées en 2017 contre le producteur américain Harvey Weinstein dans le cadre du mouvement #moiaussi, l’accusant d’agression sexuelle alors qu’elle avait 24 ans.

Jacquot a déclaré au journal Le Monde qu’il « ne se sent pas directement concerné » par les accusations de Judith Godrèche, dont il dit être tombé amoureux à l’époque. Il a nié tout abus d’autorité.

Quant à Jacques Doillon, il a déclaré à l’Agence France-Presse que « la juste cause ne justifie pas les dénonciations arbitraires, les fausses accusations et les mensonges ».

Suite aux accusations de Judith Godrèche, d’autres femmes ont décidé de prendre la parole.

Isild Le Besco, 41 ans, a accusé Jacquot de « violence psychologique et physique » dans une relation avec lui qui a commencé quand elle avait 16 ans et lui 52 ans. Elle a également accusé Doillon d’avoir choisi quelqu’un d’autre pour un rôle qu’elle était censée obtenir parce qu’elle a refusé ses avances sexuelles.

Une autre actrice, Anna Mouglalis, 45 ans, a accusé Doillon d’agression sexuelle en 2011.

L’industrie cinématographique française est déjà fortement ébranlée par les accusations d’inconduite sexuelle portées contre le célèbre acteur Gérard Depardieu.

Et en 2020, des manifestations de militants des droits des femmes ont eu lieu lors de la cérémonie des Césars, le réalisateur Roman Polanski ayant remporté par contumace le prix du meilleur réalisateur. L’actrice Adèle Haenel, qui avait dénoncé des agressions sexuelles présumées commises par un autre réalisateur français au début des années 2000 alors qu’elle avait 15 ans, s’est levée et est sortie de la pièce.

Roman Polanski est toujours réclamé par la justice des États-Unis depuis plusieurs décennies après avoir été accusé du viol d’une jeune fille de 13 ans, en 1977.