Encore aujourd'hui, le nom Saab évoque la démocratisation de la suralimentation par turbocompresseur avec la 99 Turbo, lancée en 1977. Son style atypique, son hayon et son aménagement intérieur truffé de clins d'oeil au passé aéronautique de la marque ont contribué à donner naissance à des voitures différentes, un atout aujourd'hui pour qui veut se distinguer de la masse.

Ces images ont un peu jauni. GM et son obsession de rentabilité sont passés par là. Le géant américain éprouve encore du mal à saisir la personnalité du petit constructeur suédois, mais ce dernier y trouve son compte en ayant accès à l'un des plus imposants dépôts de pièces de la planète. Surtout que cela n'empêche nullement la 9-3 d'afficher une réelle personnalité et de conserver certaines particularités, comme le contact planté entre les sièges avant, ou la fonction Night Panel, qui permet d'illuminer seulement les fonctions dites essentielles.

Si la réalisation d'ensemble est agréable, cette Saab dépayse plus qu'elle ne laisse une sensation de luxe véritable. La finition n'a jamais été aussi soignée, preuve du sérieux de l'assemblage, et l'ajustement des revêtements ne soulève aucune critique; cependant, le design tarabiscoté de certains éléments manque par endroits d'élégance et de raffinement.

On regrette sans doute encore que le pare-brise cintré des anciennes 900, qui soulignait l'aspect «cockpit d'avion» de l'habitacle, n'ait pas été repris à bord de l'actuelle 9-3. En revanche, le tableau de bord vertical, la clé de contact à la base du levier de vitesse (ce qui bloque la boîte de vitesses lorsque le véhicule est arrêté), et la disposition judicieuse et logique des instruments relèvent bien de l'ergonomie de l'aéronautique.

La vitesse est indiquée en gros chiffres jusqu'à 140 km/h, alors qu'ils sont beaucoup plus petits et serrés ensuite, comme si Saab voulait reprocher à ses clients d'exploiter des moteurs de 210 à 255 chevaux.

Un coffre facile d'accès

Tout comme ses principales rivales, la Combi Sport offre une capacité de chargement limitée. Avec le couvre-bagages et la banquette en place, le volume utilitaire de cette familiale est inférieur à celui de la berline. À défaut d'offrir un volume record, cette cinquième porte s'ouvre sur un coffre facile d'accès grâce à un seuil bas et à une ouverture large. D'un seul bloc, l'assise amovible permet de disposer d'un plancher parfaitement plat en basculant le dossier.

De plus, on apprécie ses petites attentions comme les réceptacles dissimulés sous le plancher ou la banquette arrière qui se rabat d'une seule main et ce, sans coincer les ceintures de sécurité. Pour le reste, cette suédoise se contente de solutions d'aménagement connues. En outre, les rangements ne sont pas nombreux et seule la boîte à gants (contrairement aux bacs des portes) est adéquate.

Puisant dans la banque d'organes GM tout en concevant ses voitures dans un plaisant esprit aéronautique, Saab doit trouver sa masse critique. Les investissements consentis par GM obligent le constructeur suédois à vendre encore plus d'unités pour atteindre le seuil de rentabilité fixé par son propriétaire. Le défi est de taille et, à défaut de pouvoir concevoir une Saab pur jus, la stratégie n'est donc pas de convaincre, mais plutôt de séduire.

D'ailleurs, l'essentiel des 2157 modifications apportées cette année touche des éléments esthétiques: capot, ailes, phares, calandre, etc. Les nouveautés techniques? Elles se comptent sur les doigts d'une main: rouage intégral (sur lequel nous reviendrons un peu plus loin), phares au xénon qui «éclairent dans les coins» et puissance accrue de cinq chevaux du V6 de 2,8 litres. C'est maigre.

Comme à l'accoutumée, la version Aero accueille exclusivement le 2,8 litres suralimenté par turbocompresseur. Ce moteur, construit à partir d'un bloc V6 Opel largement modifié, fait appel à un turbo qui fournit un couple copieux de 258 livres/pied à 2000 tours/minute. À l'usage, le déploiement onctueux et charpenté du V6 le rapproche d'un petit V8, alors que la puissance absolue n'a rien d'impressionnant pour sa cylindrée. Mais quelle sensation de réserve de puissance et de sécurité!

Deux boîtes se chargent de relayer puissance et couple aux roues motrices. La boîte semi-automatique à six rapports est, à notre humble avis, la plus recommandable et ne diminue en rien l'agrément de conduite. Bien au contraire. Sa gestion électronique permet de mieux exploiter la courbe de puissance du moteur que la manuelle, dont l'imprécision du levier n'a d'égal que la longueur encore exagérée de la course. Revers de la médaille: la semi-automatique est plus gourmande (environ 1 L/100 km).

Une bonne précision de conduite

Centrée sur l'avant (60% sur la Sport Combi comparativement à 53% pour la berline), la 9-3 est rivée dans une attitude de traction au comportement légèrement sous-vireur. Le poids n'est pas ressenti négativement, et la caisse vire à plat sans déhanchement, procurant une très bonne précision de conduite. Pourtant, cette familiale n'est pas taillée pour le sport. La suspension raffermie et les pneus à taille basse secouent un peu les passagers lorsque l'allure se fait vive, mais on a déjà vu bien pire. La suédoise ne cherche qu'à offrir une option crédible aux familiales allemandes. Elle n'y parvient qu'à moitié puisque, malgré le durcissement judicieux des suspensions et le copieux élargissement des roues, il y a toujours 255 chevaux à transmettre à l'essieu avant.

Actuellement, la solution passe uniquement par les aides à conduite; d'ici à la fin de l'année-modèle 2008, une version intégrale (à quatre roues motrices) viendra - enfin - clore ce chapitre sur la motricité défaillante des Saab sur chaussée à faible coefficient d'adhérence. Pour l'heure, la familiale suédoise paraît surtout silencieuse et confortable, filtre les secousses avec un certain succès et procure une solidité rassurante proche des meilleures allemandes. Alors, ces 2157 transformations sont-elles suffisantes pour décider d'acheter une 9-3? Peut-être pas pour l'acheter, en raison de sa faible valeur de revente et du coût des entretiens et des pièces de remplacement. La louer, en revanche, sera une option plus intéressante, surtout le jour où on pourra lui greffer le rouage intégral dont elle a grandement besoin.

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On aime

> La solidité et la vélocité du moteur

> La boîte semi-automatique bien adaptée à la courbe de puissance

> Le confort des sièges et l'excentricité de certaines commandes

On aime moins

> L'image diffuse de la marque

> Le rouage intégral qui se fait toujours attendre

> La valeur de revente et le prix des pièces de remplacement