Une équipe de psychologues et d'ingénieurs australiens a pris le taureau par les cornes: pour régler le problème, selon eux, il faut imposer des feux rouges pour tout le monde, pendant la nuit, dans les quartiers fréquentés par les fêtards.

Une équipe de psychologues et d'ingénieurs australiens a pris le taureau par les cornes: pour régler le problème, selon eux, il faut imposer des feux rouges pour tout le monde, pendant la nuit, dans les quartiers fréquentés par les fêtards.

«Selon les années, un bon tiers des piétons blessés ou tués par des automobiles en Australie sont saoûls, explique Bruce Corben, en entrevue téléphonique depuis l'Université Monash, à Victoria. La grande majorité d'entre eux se font frapper alors qu'ils traversent sur un feu rouge, ou entre deux intersections, à l'extérieur des passages piétonniers. Sur les cartes, nous pouvons voir des concentrations d'accidents impliquant les piétons près des lieux où il y a beaucoup de bars.» À noter, cela ne signifie pas que les automobilistes n'ont rien à se reprocher dans ce genre d'accident.

L'une des solutions, selon l'ingénieur australien, est de ralentir considérablement la vitesse des voitures. Pour ce faire, il propose de mettre tous les feux au rouge, dans les quartiers chauds, après 21h ou 22h. «De toute façon, il y a beaucoup moins de trafic à ce moment. Et les automobilistes qui circulent le soir sont souvent moins pressés. Le feu passe au vert quand des senseurs placés sous la chaussée détectent la présence d'un véhicule. Les voitures devront nécessairement s'arrêter pour attendre le feu vert, à moins que d'autres véhicules aient déjà déclenché le senseur.

En 2005, M. Corben a réalisé un projet-pilote pour tester son idée dans la ville de Ballarat, à 100 km de Melbourne, qui compte 62 000 habitants. Dans le quadrilatère en question, il y avait en moyenne trois morts ou blessés grave par année. Les résultats sont encourageants: la vitesse a diminué de 11km/h, ou 28%, et la proportion de véhicules circulant à plus de 40km/h a chuté de 40%, aux deux intersections où les feux rouges nocturnes permanents ont été installés (et il n'y a pas eu d'accident grave ou mortel). La proportion de blessures graves quintuple, de 5% à 25%, entre 20km/h et 40km/h, et elle passe à 50% à 50km/h. «Nous n'avons eu aucun commentaire négatif à Ballarat», affirme M. Corben.

Un essai à Melbourne commencera avant la fin de l'année. «Il est possible que des problèmes surgissent en milieu urbain, reconnaît l'ingénieur. En ville, les journées de travail sont parfois plus étendues, le rythme de vie est plus effréné, alors les feux rouges permanents pourraient causer un problème. Il est aussi possible que le trafic soit tellement élevé, même la nuit, que les feux ne seront pas rouges beaucoup plus longtemps qu'à l'ordinaire.»

Les fêtards risquent-ils de devenir plus téméraires? «Il est certain qu'ils pourraient s'habituer à ce que les routes soient moins dangereuses, et qu'ils prennent plus de risques. Mais je crois que les bénéfices de la vitesse moins élevée resteront plus grands.»

Parmi les autres tactiques envisagées par l'équipe de M. Corben, on trouve divers aménagements routiers: des barrières pour empêcher les piétons de traverser ailleurs qu'aux intersections, des chicanes pour réduire le temps de traversée, des îlots centraux où les piétons éméchés peuvent trouver refuge, des revêtements facilitant le freinage près des intersections, l'amélioration de l'éclairage urbain, et une présence policière accrue.

Cette dernière recommandation pourrait augmenter le nombre de piétons saoûls, si les automobilistes renoncent à prendre leur voiture, mais à tout prendre, M. Corben estime que ce serait préférable.