On estime à 100 millions le nombre de motocyclettes qui sillonnent l'Asie. Cinquante millions d'entre elles sont propulsées par un moteur à deux temps. Un seul de ces moteurs émet autant de dioxyde de carbone que 30 à 50 moteurs à quatre temps. Cela équivaut au total à 2,5 milliards de voitures.

Une équipe de chercheurs américains, regroupés au sein d'Envirofit International, une entreprise sans but lucratif fondée en 2003, a mis au point un dispositif baptisé «retrofit». Il réduit de 90% les émissions d'hydrocarbures et augmente de 35% la performance des moteurs.L'histoire commence en 2001. Mary Jane Ortega, mairesse de la ville de San Fernando, aux Philippines, doit se rendre à l'évidence. La pollution de l'air produite par les motocyclettes, les scooters et les «tuks-tuks», petit triporteur avec conducteur à l'avant et passager à l'arrière, tous propulsés par des moteurs deux temps, étouffe sa ville.

La solution, pense-t-elle, serait d'interdire complètement l'utilisation des moteurs à deux temps. Mais en dépit des prêts sans intérêt de 200$ offerts pour se procurer un nouveau véhicule propulsé par un moteur à quatre temps, son idée ne récolte pas le succès escompté.

Même avec un prêt, l'achat d'une nouvelle motocyclette ou d'un triporteur s'avère trop cher pour la majorité des habitants.

Il était crucial pour la mairesse de trouver une solution moins coûteuse. Elle lui est venue d'une OGN américaine.

De la motoneige aux tuks-tuks

En 2002, un groupe d'étudiants de Brian Willson, directeur de l'Engines and Energy Conversion Laboratory, l'un des cofondateurs de Envirofit, participe à un concours commandité par la Society of Automotive Engineers. Il s'agit de concevoir une motoneige «propre» dotée d'un moteur deux temps devant être utilisée dans le parc national de Yellowstone. C'est l'engin de l'équipe gagnante qui est à la base de l'invention.

Retrofit remplace le carburateur du moteur. C'est un système d'injecteurs cylindrés. Il permet au carburant de pénétrer dans la chambre à combustion lorsque l'orifice d'échappement est fermé. Le dispositif Retrofit comprend un compresseur à air, un harnais d'attache, des adaptateurs et une nouvelle tête de cylindre. Son prix moyen est de 300$.

En 2005, Eurofit a testé son «retrofit». Après huit mois d'essai, non seulement les émissions avaient pratiquement disparu, mais les économies de carburant obtenues étaient importantes, au point de convaincre les chauffeurs de taxi d'adopter le dispositif.

Rolando Santiago, président de l'Association des conducteurs de taxis tricycles des Philippines, est fier d'avoir été l'un des premiers à installer le dispositif sur son véhicule. «Après six mois d'utilisation, affirme-t-il, le dispositif retrofit m'a permis d'économiser l'argent nécessaire à la reconstruction de ma maison et celle de mes voisins. Cela a permis à six familles de se loger.»

Cette année, l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (EPA) a accordé à Eurofit une subvention de 100 000$ afin de tester le dispositif en Inde. L'objectif de l'ONG est d'introduire 15 000 dispositifs sur le marché asiatique d'ici la fin 2008.