Rafael Payare a montré qu’il pouvait se dépasser à chaque concert, dans des répertoires souvent bien différents. Le concert d’ouverture de la présente saison (la première intégralement pensée par lui), donné mardi soir à la Maison symphonique, n’a pas fait exception.

L’association de la Messe glagolitique de Janáček et du Sacre du printemps de Stravinski pouvait surprend de prime abord. Mais au terme du concert, l’association de ces deux œuvres héritières d’un authentique slavisme musical initié notamment par le Groupe des Cinq (Moussorgski en particulier) paraissait naturelle, malgré la dichotomie entre une première partie sacrée et une seconde incontestablement païenne.

Cela faisait un bail que l’OSM ne s’était pas lancé dans cette partition phare de Janáček. Il faut dire que les forces en présence ne chôment pas. Autant le chœur que les différents pupitres de l’orchestre sont fortement sollicités dans l’aigu, engendrant une tension qui s’accorde toutefois à merveille avec le côté « rugueux » de la partition. Ces exigences techniques sont en outre accompagnées de défis bien réels sur le plan de l’intonation, défis qu’aucun ensemble, même chevronné, ne peut prendre à la légère.

Mais le degré de finition était malgré tout impressionnant, en particulier du côté du chœur (préparé par Andrew Megill), qui a parcouru sans encombre la partition. Les sopranos se sont spécialement signalées par la qualité de leur timbre.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Quelques membres du chœur de l’OSM, mardi soir

Du côté des solistes, placés devant l’orchestre, la soprano suédoise Camilla Tilling, aussi très sollicitée dans les aigus, s’est pareillement démarquée avec une voix à la fois souple et puissante. Le ténor Ladislav Elgr, seul compatriote de Janáček du lot, a eu davantage de mal dans ses aigus qui, il faut dire, sont particulièrement redoutables. La contralto québécoise Rose Naggar-Tremblay et la basse britannique Matthew Rose, beaucoup moins en vedette, ont été idéaux.

Le succès est en grande partie redevable à Rafael Payare, qui a dirigé la Messe avec une énergie qui n’a jamais fait défaut. Une énergie qui nous a même semblé un peu trop débordante au départ, l’Introduction et le Kyrie étant à notre sens davantage « andante » que « moderato ».

De la même manière, la différence entre les multiples épisodes du Gloria (une suite de courtes vignettes, comme chez Stravinski) semblait aplanie.

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Rafael Payare dirigeant l’OSM mardi soir

Le chef a toutefois commencé à se détendre davantage dans le Credo, dont la musique a tout d’un coup pris davantage de relief. Le reste de la partition fut à l’avenant.

L’organiste Jean-Willy Kunz a offert un excellent Postlude, joué sur la console à traction mécanique juchée en haut de la salle. Contrairement à plusieurs interprètes, il n’a pas bousculé le discours (c’est un Allegro, pas un Prestissimo… sauf à la fin), faisant bien ressortir chaque élément avec des registrations où les anches et les mixtures étaient idéalement équilibrées.

Ce n’était encore rien, puisqu’attendait toujours le Sacre. Là, point de bémol pour le début, qui va tout de suite droit au but (si on excepte un crescendo un peu agressif du bassoniste solo). Les contretemps (en particulier dans les célèbres « Augures printaniers ») sont juste assez percussifs. Les « Rondes printanières » sont vraiment « tranquillo ». Tout est en souplesse, tout respire. On s’assoit et on savoure. Ce n’est pas plus compliqué que ça.

Ce mercredi et jeudi soir, 19 h 30, à la Maison symphonique

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