L’artiste visuel québécois Paul Abraham a créé une immense fresque sur la façade du Musée naval de Québec à l’occasion du centenaire de la Réserve navale du Canada. L’œuvre graphique de 200 m de long est inaugurée ce jeudi dans le port de Québec.
La Réserve navale du Canada, qui comprend 24 divisions dans les grandes villes du pays, a été créée le 31 janvier 1923, peu après la Première Guerre mondiale, pour constituer une réserve de marins volontaires. Sorte de marine citoyenne, elle pallie des besoins divers de la Marine royale canadienne. Aujourd’hui, plus de 4000 marins travaillent à temps partiel pour la Réserve navale du Canada. Ils participent à des opérations de secours, lors de catastrophes naturelles (inondations, incendies de forêt) ou aident des personnes dans le besoin comme on l’a vu durant la pandémie de COVID-19.
Pour marquer ce centenaire, les divisions de la Réserve navale du Canada ont été appelées à organiser des activités. Celle de la Vieille Capitale a mis à profit le Musée naval de Québec, un musée officiel des Forces armées canadiennes, qui a pris l’initiative de faire réaliser une fresque commémorative. C’est l’artiste québécois Paul Abraham qui a été choisi l’an dernier pour réaliser cette œuvre de grande ampleur.
28 panneaux de toile imprimée
Ornant le complexe naval de la Pointe-à-Carcy, au 170, rue Dalhousie, la fresque est constituée de 28 panneaux de toile imprimée fixés sur les murs et fenêtres du musée, comme les voiles d’un navire. L’œuvre évoque 100 ans d’histoire de la Réserve navale avec 245 personnages en action.
Parmi eux, Frédéric Rolette, un marin francophone originaire de Québec et héros de la guerre de 1812. Ou encore Pierre-Étienne Fortin, capitaine de la goélette La Canadienne, un célèbre voilier armé pour la protection de la pêche surnommé « le roi du Golfe ». On trouve aussi Winston Churchill et Franklin D. Roosevelt, réunis lors de la Conférence de Québec, du 17 au 24 août 1943, pour convenir d’une stratégie par rapport à la guerre qui faisait alors rage en Europe.
Pour réaliser cette fresque – un travail qui a duré six mois –, Paul Abraham a eu accès aux archives du musée. Il a collaboré avec Samuel Venière, responsable du projet et historien du musée, pour que la fresque respecte sa vision, mais aussi les attentes du musée. Il a bénéficié, durant trois mois, de l’aide de sa conjointe, l’artiste et coloriste Pascale Bourguignon.
Les personnages et éléments qui composent la fresque sont à la fois imposants et détaillés. « J’ai très vite décidé de produire les images directement sur tablettes graphiques à taille réelle, soit à l’échelle 1, pour éviter le processus traditionnel de reproduction sur cartons, dit Paul Abraham. Cela a donné une surface énorme à couvrir, même sur un écran d’ordinateur, mais cela a permis d’éviter les différentes étapes d’un travail fastidieux, comme la reproduction en projection des esquisses originales sur des cartons. »
Connaissance de la mer
Les illustrations font penser à une bande dessinée. Né en Suisse, Paul Abraham a une longue expérience du récit et des personnages héroïques. Il a passé une partie de son enfance au bord de la mer Méditerranée. « Mon père a été médecin de bord sur des navires de croisière, dit-il. J’ai partagé à quelques reprises ses voyages qui sont à l’origine de mon attirance pour l’univers maritime. »
La plongée dans l’histoire que représente ce projet avait attiré l’artiste. « J’y ai vu une similitude avec les projets qu’on assignait aux artistes de la Renaissance et du Baroque, dit-il. Je ne me compare pas aux maîtres anciens, bien sûr, mais pour moi, c’était comme de rendre hommage à ces artistes qui m’ont toujours fasciné. La Renaissance – Botticelli, Vinci, Michel-Ange – et l’art baroque [Vélasquez, Caravage et Bernin] ont eu une influence sur mon travail. J’y fais souvent référence à travers les attitudes des personnages et les compositions. »
J’aime utiliser les procédés de l’illusionnisme baroque, comme le raccourci, le trompe-l’œil et la mise en scène. Et j’ai un personnage récurrent : le superhéros, au sens large du terme.
Paul Abraham, artiste visuel
L’artiste a d’abord soumis au musée les esquisses des panneaux pour les faire approuver. Il est intéressant de remarquer le cheminement de l’œuvre, depuis l’esquisse jusqu’au rendu final en contemplant les toiles 25 et 26.
Paul Abraham est très heureux d’avoir réalisé une œuvre qui aura une belle visibilité, le port de Québec étant visité par 600 000 personnes chaque année. Si vous avez les ailes d’un ange, alors c’est le temps de partir pour Québec et d’aller admirer cet hommage à une institution et à des hommes et des femmes qui choisissent depuis 100 ans de donner de leur temps pour soutenir les autres. L’art et l’aide des thérapies...