(Namur) La ville belge de Namur qui accueille une sculpture monumentale de l’artiste Jan Fabre a décidé d’alerter le public sur les « actes graves qu’il a commis » en y plaçant un bandeau noir, a constaté un photographe de l’AFP.

Figure majeure de l’art contemporain, à la fois plasticien et chorégraphe, Jan Fabre a été rattrapé par la vague #metoo et condamné le 29 avril par le tribunal correctionnel d’Anvers à 18 mois de prison avec sursis, notamment pour un baiser avec la langue non consenti à une ancienne danseuse de sa troupe. Le geste a été qualifié d’« attentat à la pudeur ».

Les accusations de six des douze victimes présumées ont été écartées par le tribunal. Mais l’artiste, qui réfutait les plaintes en bloc, a aussi été reconnu coupable de violences ou humiliations à l’égard de cinq danseuses. Il n’a pas encore annoncé s’il interjetait appel ou pas.

À Namur, la municipalité, qui accueille depuis 2015 sur les hauteurs de sa citadelle la tortue géante de Jan Fabre Searching for Utopia, a annoncé le 3 mai des « mesures additionnelles » sur l’œuvre pour prendre en compte cette condamnation.

« Le maintien de l’œuvre a été confirmé mais sera assorti de plusieurs mesures d’accompagnement destinées à illustrer la désapprobation de la Ville à l’égard de Monsieur Fabre et des actes graves qu’il a commis et pour lesquels il a été condamné par la justice », a-t-elle expliqué dans un communiqué.

À côté de cette tortue de six tonnes en bronze, chevauchée par un personnage représentant l’artiste lui-même, « un panneau informatif […] rappelant sa condamnation et ses motifs » sera prochainement installé.

Mais la mesure la plus remarquable, mise en œuvre dès jeudi, six jours après la condamnation, a consisté à recouvrir les yeux du personnage d’un bandeau noir.

Le morceau de tissu restera en place sur ce Jan Fabre en miniature « durant 18 mois, soit la durée de sa condamnation avec sursis », a précisé la ville.

En outre, l’éclairage de nuit de la sculpture est suspendu pour qu’elle « ne soit plus mise en valeur de manière nocturne durant 18 mois également ».

La ville wallonne a dit s’inspirer d’une initiative similaire des Musées royaux des beaux-arts de Belgique, à Bruxelles, où un ensemble de cinq panneaux monumentaux de Jan Fabre (une œuvre au stylo bille sur le thème du regard) est désormais privé de projecteurs.

« Retirer l’œuvre cela aurait signifié retirer le débat qui l’accompagne, la laisser c’est participer au débat », a dit à l’AFP Michel Draguet, directeur de l’institution. Il a souligné qu’un panneau de « contextualisation » avait aussi été installé pour expliquer cette absence de lumière due à la condamnation de l’artiste.