Personnelles et universelles, les dernières oeuvres de Fabrizio Perozzi, exposées à la galerie Laroche/Joncas jusqu'au 17 décembre, explorent la nature humaine avec talent et raffinement. Des toiles qui signent les qualités esthétiques, philosophiques et humaines du peintre montréalais. À ne rater sous aucun prétexte!

La commissaire Joyce Yahouda connaît bien Fabrizio Perozzi. Elle a représenté le peintre d'origine italienne jusqu'à ce qu'elle ferme sa galerie l'an dernier. Mais elle est restée en contact avec lui et a suivi la genèse de son dernier corpus, Intimités/Intimité, en se rendant à plusieurs reprises dans son atelier. 

La galerie Laroche/Joncas a choisi de montrer ce nouvel ensemble d'huiles sur toile de Fabrizio Perozzi dans un local restauré du 4e étage du Belgo (espace 442) tout en exposant une douzaine de toiles plus anciennes dans son espace 410 pour survoler le travail du peintre de 1978 à 2012. 

La série Intimités/Intimité est constituée de huit toiles, des études corporelles ne portant pas sur de jeunes éphèbes, mais sur des personnes d'âge mûr. L'approche photographique et séquentielle de Perozzi explore l'intimité d'une relation charnelle par petits bouts. Comme si l'on avait trouvé des petits morceaux d'images d'un film en devenir. 

«En exagérant les traits, en fragmentant les corps, à travers les corps enlacés et les marques du temps, Perozzi fait ressortir le caractère de ses personnages, reflétant l'intimité, la tendresse, la pudeur, la fragilité. Du contact avec autrui, les images intimes évoquent le désir», écrit Joyce Yahouda dans son texte accompagnant l'exposition.

Calme et sérénité 

La peinture de Perozzi est plus calme et sereine que jamais. Le critique et peintre Leo Rosshandler a déjà souligné sa touche tranquille, un «art du calme» qui transmet en même temps une réflexion sur la vie. 

Fabrizio Perozzi pénètre le monde intérieur de ses personnages. Il l'avait déjà suggéré avec son corpus Qui a peur du rouge?, dans les années 90. Mais sa nouvelle série est plus mystérieuse, moins rassurante. Les personnages n'ont pas de regard. Ce nouveau travail tient de la méditation sculpturale, de l'étude du toucher, de la connivence, de la rencontre et du partage entre deux êtres. 

Dessin fignolé

La technique de Fabrizio Perozzi joue avec notre perception, différente selon notre position par rapport à la toile. Il l'a toutefois bonifiée avec un nouvel attachement marqué à peaufiner les détails. Avec un dessin fignolé qui a remplacé l'impression de glamour par une sorte de poésie picturale. 

Il suffit de s'approcher des toiles pour constater combien les chairs sont des amalgames complexes de coloris qui, de loin, donnent une impression de chaleur, de proximité humaine et de lenteur de vivre. 

Des nuances sobres font surgir les plis naturels de la peau, la forme changeante des doigts, la douceur et l'âge avancé de l'épiderme. Ce corpus est aussi une réflexion sur le vieillissement, mais un vieillissement qui endosse l'anéantissement annoncé et jouit du présent. 

Bien sûr que cette exposition est aussi la chair et l'âme du peintre lui-même. On en devient persuadé en visionnant Intimité, la vidéo de quatre minutes qui accompagne les tableaux. Une vidéo dans laquelle défilent des photos en noir et blanc reliées à la vie de Fabrizio Perozzi, aujourd'hui âgé de 65 ans.

Intimités/Intimité est une ode à ce temps qui vibre en soi, à la lutte, à la résilience qui anime ceux qui refusent de sombrer. Un hommage aussi à la volonté qui galvanise Fabrizio Perozzi, un peintre figuratif trop souvent snobé au Québec parce que «trop européen» et qui poursuit malgré tout sa quête de compréhension de la peinture. 

Une quête sereine qu'il illustre avec le tableau Memento Mori: un personnage africain assis près d'un crâne humain et d'une statuette. Une vanité qui fait référence à l'isolement, à la solitude et à l'incompréhension, tous sentiments que Fabrizio Perozzi synthétise par une citation de Pier Paolo Pasolini: «La mort n'est pas dans la non-communication, mais dans le fait de ne plus pouvoir être compris.» 

S'il est calme, le peintre de la rue Parthenais est encore bien vivant! Comme son oeuvre qui parle de fierté, de talent et de ce bonheur serein qui défie le destin. Non, vraiment, la mort ne dit pas merci à Fabrizio Perozzi. 

Intimités/Intimité, jusqu'au 17 décembre, et Points de repères, jusqu'au 22 décembre. Fabrizio Perozzi à la galerie Laroche/Joncas (espaces 410 et 442 du Belgo, 372, rue Sainte-Catherine Ouest, Montréal).