D'ordinaire, les larges fresques de l'organisme MU sont créées sur des infrastructures permanentes, surtout des murs, mais hier, c'est sur une palissade du chantier de la Place des Arts qu'une peinture de Carlito Dalceggio a été inaugurée. Une première - et sûrement pas une dernière - pour MU.

Si les Montréalais sont de plus en plus exaspérés de voir des vandales graffiter les murs des ruelles, les boîtes aux lettres, les abribus ou la moindre clôture demeurée miraculeusement vierge, l'organisme MU contribue à détourner la dégradation en favorisant un art urbain organisé et plaisant.

Si MU a créé quelque 70 murales depuis 2007 en collaborant avec des propriétaires privés ou des organismes publics, l'idée d'élargir son action aux chantiers de construction ne date pas d'hier.

«Ça fait des années qu'on aspire à convaincre la Ville de Montréal et le milieu de la construction et de l'immobilier de la pertinence de créer des murales sur des palissades de chantier, dit Elizabeth-Ann Doyle, cofondatrice et directrice de MU. Nous étions présents au Centre canadien d'architecture en octobre dernier à la Conférence sur l'aménagement des chantiers urbains. Nous étions aussi en mode "peinture en direct sur palissades" à l'événement JEVOISMTL afin d'allumer les décideurs là-dessus.»

Inspiré par la musique

Ce travail de persuasion semble avoir donné des résultats positifs pour l'image de Montréal puisque la Place des Arts et la Banque Nationale se sont associées pour inviter MU à réaliser une première murale artistique sur une partie de la palissade du chantier de l'esplanade de la Place des Arts.

«L'art se déploie sous plusieurs formes à la Place des Arts et l'appui aux créateurs est un élément fondamental de notre mission», souligne Marc Blondeau, PDG de la PdA.

La murale a été dessinée cette semaine pendant trois jours par Carlito Dalceggio sur une large clôture bordant la rue Saint-Urbain, près de la rue Sainte-Catherine. L'artiste a réalisé L'extase des violons ivres en s'inspirant du volet musical des spectacles de la Place des Arts.

«Pour moi, la musique et les arts visuels proviennent de la même source, et la musique a toujours été ce qui m'inspire le plus», dit l'artiste montréalais de 44 ans.

«La musique te fait rejoindre un espèce de moment sacré, en dehors du temps, ce qu'on appelle le hit dans le jazz, soit quand on perd un peu le contrôle.»

On retrouve dans sa murale consacrée «au violon magique d'Angèle Dubeau» toute la symbolique de Carlito Dalceggio (ses personnages, ses oiseaux, ses végétaux et ses chevrons), associée à des formes rouges représentant des notes de musique, une sorte d'alphabet secret et imaginaire. Il a ajouté à ses dessins de fines coulées multicolores qui évoquent une portée musicale, tout en étant en continuité avec les stries de béton grisâtres de l'édifice du Théâtre Maisonneuve.

Évoquant des esprits libres qui jouent du violon, l'artiste relate, comme toujours dans son oeuvre, cette quête universelle et personnelle de paix et de liberté qui l'anime, une recherche d'harmonie entre les humains et la nature.

«Chaque murale est comme une clé pour rejoindre un nouveau monde, dit-il. Un monde libre que la personne découvre pendant qu'elle regarde la murale.»

La murale va rester une année à cet endroit, le temps que le chantier se déroule. Puis, elle sera démontée et remontée ailleurs. «Nous allons la vernir, puis on lui trouvera une place où elle rendra quelques personnes heureuses», a dit à La Presse l'ex-journaliste Geneviève Rossier, devenue directrice Communication, Marketing et Contenus numériques à la Place des Arts.

Ce lieu qui se verra offrir la murale de Carlito Dalceggio sera peut-être l'hôpital Sainte-Justine, un lieu où l'on recherche la meilleure harmonie possible au sein du corps, mais aussi avec l'esprit...