Les créateurs de l'exposition Indiana Jones et l'aventure archéologique avaient promis une expérience muséale nouvelle. Ils ont tenu promesse. Et à plus d'un égard.

L'exposition, qui s'est ouverte jeudi au Centre des sciences du Vieux-Port de Montréal, atteint son objectif de nous faire découvrir l'archéologie par l'intermédiaire des films d'Indiana Jones, qui a conquis le monde voilà 30 ans avec Les aventuriers de l'arche perdue.

Elle est ici, dans sa vitrine, l'arche du film, dans toute sa magnificence dorée, exposée dans des «conditions muséales» de température, d'humidité, d'éclairage et de sécurité.

Comme pour le reste des quelque 150 objets de la collection de Lucasfilm, le visiteur entre le numéro de l'artefact sur l'écran tactile de son «compagnon vidéo» pour lire ou entendre - ou voir sur son écran portatif personnel - des explications sur l'histoire réelle de l'objet et son rôle comme instrument dramatique. Livrées sur un ton léger par des pseudo-fans (Steve Gagnon et Catherine de Sève), des anecdotes sur les acteurs et le tournage s'inscrivent - Hollywood oblige - dans la tendance moderne d'hyper-starisation.

Le compagnon vidéo fait aussi entendre le son des extraits des quatre films montrés en boucle sur des écrans de dimension moyenne. Et souvent sans le punch: ainsi, dans L'arche perdue, vous ne verrez pas fondre le visage de l'agent nazi, l'un des effets les plus saisissants du cinéma moderne. Décision de Lucas.

Vendredi, par ailleurs - «L'aventure technique», ici, est encore dans sa phase de rodage -, le «compagnon» a été réduit au silence par un problème de transmission sonore et on notait un décalage constant entre le mouvement des lèvres à l'écran et les paroles entendues dans nos écouteurs.

Rien, toutefois, pour enlever au plaisir du cinéphile ou du simple esprit curieux, qui examineront avec intérêt le crâne de cristal et, plus loin, le squelette auquel il appartient ou, seule pièce à l'air libre, la moto Harley-Davidson 1950 de Mutt Williams (Shia LaBoeuf), fils d'Indiana Jones qui apparaît dans le quatrième film (2008).

Voyez ici, le cadavre momifié - dans son armure! - d'un chevalier de La dernière croisade (1989); là, une vidéo montrant le tournage/trucage de la poursuite de chariots dans la mine du Temple maudit. Voilà pour la réalité de la fiction.

La science, elle, la vraie, se trouve dans quatre salles indépendantes où la belle voix d'Annick Bergeron nous dirige dans les grottes de la méthode archéologique, illustrée par des archives du magazine National Geographic et des objets prêtés par le Penn Museum. Le greyware d'il y a 3000 ans est bien l'ancêtre du TupperWare moderne...

Comment travaillait, il y a 80 ans sur le site inca de Machu Picchu, l'équipe dirigée par Hiram Bingham, professeur à l'université Yale comme le Docteur Jones, son illustre «collègue»? Pourquoi Angkor Wat, au Cambodge, la plus grande ville du monde au XIIe siècle, est-elle disparue en moins de 400 ans?

Le contenu didactique des salles «archéologiques» commande toutefois un degré d'attention qu'il est parfois difficile de conjuguer avec la présence de groupes de jeunes visiteurs qui, ignorant les géoglyphes des Nazca, courent sur «La piste d'Indie», à la recherche de fragments d'objets qu'ils doivent reconstituer. Cette techno-quête, rien de surprenant, s'avère l'aspect le plus populaire de l'expo.

La présence à l'étage (à aire ouverte) d'une centaine d'écoliers engagés bruyamment dans une tout autre activité pédagogique s'avère un autre défi à l'attention du visiteur normalement disposé.

Le Centre des sciences est un magnifique vecteur de démocratisation du savoir, mais on aurait peut-être avantage, ici, à revoir les conditions de ce type nouveau de cohabitation muséale que représente, de spectaculaire façon, Indiana Jones et l'aventure archéologique.