Les principaux propriétaires de stations francophones de radio veulent toujours une diminution des quotas de musique francophone sur leurs ondes. Mais ils estiment que le CRTC devrait attendre de pouvoir imposer des nouvelles obligations de contenu francophone aux radios numériques comme Spotify avant de décréter une baisse des quotas de musique francophone à la radio traditionnelle.

Depuis 2006, le CRTC exige des stations de radio musicales francophones au Québec qu’elles diffusent 65 % de musique francophone la semaine (entre 6 h et minuit), incluant 55 % de musique francophone aux heures de grande écoute (6 h-18 h). Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications (CRTC), l’organisme fédéral de réglementation, révise actuellement ses règles pour la radio commerciale.

Quatre des cinq plus importants propriétaires de stations francophones de radio au Québec, Bell Média (Énergie, Rouge), Cogeco (Rythme, Planète, CKOI), Arsenal Média (O, Plaisir) et RNC Média (CHOI), jugent leurs quotas de musique francophone trop élevés. En 2015, les principaux propriétaires de stations de radio ont demandé au CRTC de diminuer les quotas de musique francophone de 65 % à 35 %. L’ADISQ et l’Union des artistes sont fortement opposées à une telle diminution des quotas.

Cette fois-ci, Bell Média, Cogeco, Arsenal Média et RNC Média n’ont pas chiffré la baisse des quotas de musique francophone qu’ils demanderont éventuellement. Mais selon eux, les quotas de 65 % (incluant 55 % en heures de grande écoute) « ne sont pas en phase avec les habitudes de consommation et d’écoute de la musique par les différents groupes cibles de l’auditoire francophone », écrivent-ils dans leur mémoire au CRTC rendu public mardi matin. Ils font notamment valoir que les auditeurs de 18-44 ans et ceux de 25-54 ans « consacraient respectivement 26 % et 30 % de leur écoute de musique » à la radio à la musique francophone. Sur les plateformes numériques, la musique francophone représente seulement 2,7 % des 10 000 chansons les plus populaires, indiquent-ils.

S’ils jugent les quotas trop élevés, les propriétaires de radios francophones ont préféré demander au CRTC d’attendre l’adoption du projet de loi fédéral C-10, qui imposerait des obligations aux radios numériques et aux services étrangers d'écoute en ligne comme Spotify, avant de diminuer les quotas de musique francophone. Selon leur proposition, le CRTC pourrait ensuite rééquilibrer les obligations de tous les joueurs dans le système, incluant les radios traditionnelles.

« [Nous sommes] d’avis que, par principe d’équité, tous les éléments du système, incluant les services étrangers exerçant leurs activités sur le territoire canadien, doivent apporter une contribution à la hauteur de leurs moyens et des revenus qu’ils tirent de leur exploitation en sol canadien. […] La réévaluation des quotas de musique applicables aux stations de radio commerciales de langue française devrait se faire dans un contexte plus global d’évaluation de la contribution respective des services audio dans leur ensemble », écrivent Bell Média, Cogeco, Arsenal Média et RNC Média dans leur mémoire commun. L’Association des radios régionales francophones signe aussi ce mémoire.

En attendant l’adoption du projet de loi C-10, les propriétaires de stations de radio francophones demandent tout de même immédiatement quelques assouplissements de leurs obligations en matière de quotas de musique francophone.

Ainsi, les quotas de musique francophone seraient toujours de 65 % la semaine et de 55 % durant les heures de grande écoute. Mais on calculerait la semaine et les heures de grande écoute de façon différente. Ainsi, la semaine passerait de 6 h-minuit à 5 h-1 h du matin, et les heures de grande écoute passeraient de 6 h-18 h à 5 h-19 h. Ce changement pourrait permettre en pratique de diffuser davantage de musique francophone tôt le matin (de 5 h à 6 h du matin) et tard le soir (de minuit à 1 h du matin) alors que très peu de gens écoutent la radio, et un peu moins de musique francophone durant le milieu de la journée et en soirée.

Les propriétaires de stations de radio demandent aussi qu’une chanson d’un artiste francophone émergent ou d’un artiste francophone vivant dans un milieu francophone minoritaire (exemple : au Canada anglais) compte pour 150 % dans le calcul des quotas.