(Québec) Acheter québécois, ça veut aussi dire s’abonner à un média local pour l’encourager, estime la députée libérale de Verdun, Isabelle Melançon, qui juge la situation critique.

« On est vraiment à la jonction de ce qui va passer et de ce qui va casser, a-t-elle déclaré en entrevue mardi. Le modèle était déjà fragilisé, bien là, il ne faut pas que ça casse. »

L’élue libérale dit rêver d’un « Panier bleu » pour les médias, qui souffrent d’une chute vertigineuse de leurs revenus publicitaires en raison de la crise de la COVID-19.

Ils doivent faire des mises à pied, et ce, même s’ils sont reconnus services essentiels.

Le gouvernement du Québec a récemment lancé le « panierbleu.ca » pour venir en aide aux entreprises locales. Son objectif est de guider les consommateurs vers les commerçants québécois afin de stimuler leurs ventes.

Ce projet – qui suscite un réel engouement – peut s’appliquer aux médias, selon Mme Melançon. « C’est plus vrai que jamais. […] On a un devoir collectif, mais aussi un devoir individuel à ce moment-ci », insiste-t-elle.

Selon ses calculs, s’abonner à un magazine ou à un journal québécois, par exemple, coûte entre 48 $ et 415 $ par année. Les médias d’ici produisent à son avis de l’information fiable et cruciale pour notre démocratie.

« On peut penser à Protégez-vous, à L’Actualité, La Terre de chez nous, a-t-elle énuméré en évoquant également les grands quotidiens. Ceux et celles qui sont capables, ça peut faire la différence pour nos médias, les abonnements. »

Plan d’urgence réclamé

Mme Melançon, qui est porte-parole libérale en matière de culture et de communications, invite tous les Québécois à prendre conscience de l’hécatombe dans la presse régionale, notamment.

En entrevue, elle rappelle que des entreprises telles que Québecor, Cogeco et CN2i ont déjà procédé à des centaines de mises à pied temporaires.

Métro Média, qui possède le journal gratuit Métro, a mis à pied 23 employés, tandis que La Presse a réduit la rémunération de ses employés de 14 % jusqu’à la fin de l’année 2020 et de 10 % en 2021.

Isabelle Melançon s’inquiète également pour La Presse canadienne, une agence de presse, qui n’est pas du tout soutenue par aucun gouvernement.

Pourtant, souligne la députée, les médias sont reconnus comme services essentiels par le gouvernement fédéral de Justin Trudeau et par le gouvernement provincial de François Legault.

« Moi je n’ai pas vu beaucoup de services essentiels dans ma vie qui dépendaient de revenus publicitaires », a-t-elle lancé sur le ton de l’ironie.

Mme Melançon invite les gouvernements à déployer rapidement un plan d’aide d’urgence pour les médias, en attendant les 595 millions du fédéral promis l’an dernier.

Au Québec, la commission parlementaire sur l’avenir des médias n’a toujours pas produit son rapport, sept mois après la fin des audiences.

En octobre dernier, le ministre des Finances, Eric Girard, a toutefois annoncé l’injection d’environ 50 millions par année pour aider les médias écrits seulement. Les partis d’opposition ont jugé le plan incomplet.

Une fois la crise de la COVID-19 passée, les gouvernements devront se dépêcher à taxer les géants du web, qui siphonnent depuis des années environ 80 % des revenus publicitaires des médias locaux, selon Mme Melançon.

« Si on est capable de faire payer une partie aux millionnaires de la Californie, bien faisons-le, parce qu’on va avoir besoin d’argent dans le système. »

Par ailleurs, la députée rappelle que le 2 mai dernier, les élus québécois ont adopté à l’unanimité une motion demandant au gouvernement de privilégier le placement de publicités dans les médias du Québec, au lieu de le faire sur des plateformes étrangères comme Facebook et Google.