(Paris) Avec un graphique et quelques traits, l’analyse technique prétend aider les investisseurs à prendre les bonnes décisions en Bourse. Au salon consacré à cette méthode de trading, on jure que « ce n’est pas une boule de cristal ».

« Canal baissier », « biseau ascendant », « épaule-tête-épaule » : ces termes représentent des « figures » repérées dans l’évolution des derniers jours ou mois, qui permettraient d’anticiper le prix d’une action ou d’un actif financier.

« C’est comme la météo : on repère des configurations du passé qui ont une probabilité supérieure à 50 % de se reproduire », explique Denis Desclos, président de l’Association française de l’analyse technique.

Il était présent au « salon de l’analyse technique », qui a regroupé vendredi à côté de la tour Eiffel conférenciers, courtiers ou formateurs en quête de nouveaux clients.

Jusqu’à 4000 personnes sont attendues pour cette 25e édition, selon l’organisateur, André Malpel. « On essaie de prouver que ce n’est pas une boule de cristal, mais qu’il y a de vraies raisons » qui soutiennent ces pratiques, défend-il.

La plupart des participants investissent chaque jour sur les marchés, en réalisant plusieurs dizaines de transactions à très court terme, en parallèle de leur travail.

Milieu masculin

« Quand certains font des pauses cigarettes ou café, moi, je fais du trading », surtout sur des entreprises françaises du luxe, raconte William, 49 ans, responsable financier dans un organisme public. Au total, il peut investir jusqu’à « 200 000 euros » en une séance.

À 21 ans, Mickaël Gundog est étudiant dans une école de commerce. Il s’est lancé il y a un an dans le trading et l’analyse technique, venue à lui « par les réseaux sociaux ». Livres, vidéos, webinaires : tout y passe, mais l’apprentissage « va être long », reconnaît-il.

Il espère vivre de l’analyse technique « sur le long terme », mais a investi en partie dans une plateforme canadienne, MyForexFunds, dont les fonds ont été gelés en septembre en raison d’accusations de fraude.

Il y a deux risques pour un débutant : une mauvaise formation et « tomber sur un courtier qui n’est pas régulé », explique M. Desclos.

Il recommande de se tourner vers une société « qui a pignon sur rue », gage de fiabilité en plus de l’enregistrement auprès de l’Autorité des marchés financiers.

Se faufilant entre une grosse dizaine de kiosques – payants pour les exposants – étudiants, actifs et retraités partageant leurs expériences.

Les femmes sont quasi absentes : elles ne représentent que 5 % des inscrits, dit l’organisation.

Bettina, 68 ans, s’appuie sur son propre programme informatique pour analyser plusieurs « paramètres » pour savoir s’il faut vendre ou acheter.

« Mes indicateurs fonctionnent », assure-t-elle. Mais parfois, « je suis tellement prise dans mon élan et je me plante, car je n’ai pas pris en compte d’autres paramètres ».

Elle rêve aussi d’abandonner son activité professionnelle, mais le risque est de se « désocialiser », explique-t-elle, d’autant qu’elle reconnaît « une petite addiction ».

Chameau qui vomit

L’efficacité de l’analyse technique est sujette à de vifs débats. « En France, on est considérés comme des alchimistes », reconnaît M. Desclos.

En analysant plus de 10 000 fonds, trois universitaires, dont le Français Christophe Faugère, avaient trouvé en 2013 une meilleure performance « minime, mais statistiquement significative » pour les gérants qui disaient utiliser l’analyse technique.

Le domaine peut aussi parfois virer à la farce. Au milieu des années 2010, une éditorialiste du Financial Times, Katie Martin, avait commencé « juste pour s’amuser » à tracer sur le cours de quelques actions plusieurs traits grossiers donnant le croquis d’un chameau qui vomit.

Elle diffusait les graphiques sur son compte Twitter (devenu X), assurant qu’une telle configuration impliquait que l’action en question allait continuer de baisser.

« Des personnes l’ont pris un petit peu trop au sérieux » et la figure du vomiting camel a plusieurs fois été reprise sérieusement, a-t-elle raconté par la suite.