Chaque samedi, un de nos journalistes répond, en compagnie d’experts, à l’une de vos questions sur l’économie, les finances, les marchés, etc.

Pouvez-vous m’expliquer pourquoi il y a une telle disparité entre une action comme celle de Tesla qui a valu jusqu’à 900 $, alors que l’entreprise ne fait presque pas de profits, tandis qu’une action de Volkswagen, qui est une immense entreprise qui fait des profits, vaut environ 200 $, que Ford est à 15,16 $ US et GM, à 38 $ US ?

Maurice Marier

En opposant le prix des titres, « on est en train de comparer des pommes et des oranges », entame Jean-Philippe Tarte, maître d’enseignement au département de finance à HEC Montréal.

C’est plutôt une question de pizza.

« Si on veut comparer l’envergure des titres, il faut comparer la capitalisation boursière, explique-t-il. Sa grandeur de pizza, si vous voulez. Le prix de l’action dépend tout simplement du nombre de pointes découpées dans la pizza. »

À l’heure actuelle, les diamètres des pizzas de GM et de Ford sont à peu près similaires, avec une capitalisation de 60 milliards US. Mais parce que GM a émis 1,45 milliard d’actions et Ford, 4 milliards, une pointe de la première vaut à peu près 40 $, et une portion de la seconde, environ 15 $.

« Et le nombre d’actions en circulation est totalement subjectif », ajoute-t-il.

C’est ce que montre justement le cas de Tesla. Comme le souligne notre lecteur, son action a récemment atteint 900 $ US… avant qu’elle soit fractionnée en trois, le 22 août dernier.

« Le détenteur d’une action de Tesla s’est vu accorder, pour chaque action qu’il détenait, deux actions supplémentaires, décrit notre expert. Bref, on a une plus petite pointe pour la même pizza. »

La taille de la pizza

« Maintenant, comment fait-on pour valoriser les titres, évaluer la capitalisation boursière ? », pose Jean-Philippe Tarte.

Pour fixer la taille de la pizza, les analystes s’intéressent à la croissance et aux bénéfices futurs de l’entreprise.

« Plus les bénéfices anticipés sont élevés, plus la valeur qu’on accorde aujourd’hui est élevée, décrit notre expert. Toutefois, il y a aussi le risque que présente l’entreprise. C’est ce qu’on appelle le taux d’actualisation. Plus le risque perçu est élevé, plus la valeur actualisée des bénéfices est réduite. »

La savante combinaison de ces deux facteurs permet aux analystes d’établir pour la société une valeur en date d’aujourd’hui.

Ce qui vient compliquer les choses, c’est que les pointes de cette pizza sont achetées et revendues par des investisseurs de tous poils. Le prix réel de l’action sur le marché résulte donc de l’équilibre entre l’offre et la demande.

Un analyste qui fait un travail sérieux et qui arrive à un certain prix peut être très loin du prix qu’on constate au marché.

Jean-Philippe Tarte, maître d’enseignement au département de finance à HEC Montréal

C’est précisément le cas de Tesla.

« Quand on la compare à celle d’autres grands constructeurs, pourquoi sa capitalisation, donc la valeur que les investisseurs lui accordent, est-elle à ce point élevée ? Parce qu’actuellement, les investisseurs sont très, très optimistes quant à la croissance des bénéfices futurs de Tesla. »

L’optimisme est moins débridé dans le cas de Volkswagen, de GM et de Ford, des entreprises bien installées dont les potentialités sont davantage concrétisées.

« Est-ce que le marché a raison et Tesla vaut près de 1000 milliards de dollars, ou l’optimisme des marchés est-il un peu trop gonflé ? C’est l’avenir qui le dira. »

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