Les Russes devront se passer des motoneiges, des chandails de hockey et des capteurs optiques québécois. Trois importantes entreprises d’ici, BRP, Vêtements SP et OpSens, ont confirmé jeudi mettre sur pause leurs exportations dans la foulée de l’invasion de l’Ukraine.

« Au cours des dernières semaines et des derniers jours, nous avons suivi de très près la situation en Europe de l’Est, a déclaré par courriel Biliana Necheva, conseillère principale aux relations médias chez BRP. Compte tenu de l’instabilité de la situation actuelle et des complexités commerciales, nous cessons temporairement l’exportation de nos produits vers la Russie. »

Bombardier Produits récréatifs (BRP), qui produit les Ski-Doo, Sea-Doo et Can-Am, est en Russie depuis une trentaine d’années. Ce pays était il y a moins d’une décennie son troisième marché en importance. La situation a radicalement changé à partir de 2014.

« Depuis le conflit en Crimée et les sanctions internationales qui ont suivi, les ventes de BRP en Russie représentent maintenant moins de 5 % de nos ventes totales », explique Mme Necheva. BRP dispose d’un bureau à Saint-Pétersbourg, une quarantaine d’employés et un réseau d’une centaine de concessionnaires.

Selon une note publiée par Banque Nationale Marchés financiers, on rappelle que les activités russes de BRP ont un impact « relativement petit » sur l’entreprise, à peine 1 % des revenus.

Pas de nouvelle commande

Du côté de Vêtements SP, le plus important fabricant mondial de chandails de hockey, fournisseur notamment des équipes de la Ligue nationale, des compétitions internationales et de certaines équipes de la KHL en Russie, les exportations vers ce dernier pays sont stoppées.

« Pour l’instant, je n’ai pas de commandes cette année, a expliqué Steve Bérard, président et propriétaire de l’entreprise granbyenne. En temps normal, on est en développement, ce sont des commandes qui arrivent plus tard cet été. Je ne produirai rien, on ne touchera pas à ça : j’ai demandé à toute l’équipe de ne pas lancer de nouveau projet. »

Chez OpSens, une entreprise de Québec qui a notamment obtenu un contrat russe pour ses capteurs à fibre optique dans l’industrie pétrolière en 2013, on minimise d’entrée de jeu l’importance de ce pays dans les activités en 2022. 90 % des ventes sont maintenant dans le domaine médical, précise Louis Laflamme, PDG. « Pour nous, la Russie, ça n’a aucun impact sur les résultats financiers. Évidemment, on va suivre les directives du gouvernement fédéral, mais on n’a pas l’intention de faire de ventes en Russie. Dans le contexte actuel, on va déployer nos efforts ailleurs, pour la partie médicale comme pour la partie industrielle. »

Ces trois entreprises en rejoignent d’autres au Canada qui ont récemment annoncé l’interruption de leurs exportations vers la Russie, notamment McCain Food et Canada Goose. Bombardier, de son côté, a annoncé qu’il continuerait à y vendre ses avions en évitant de faire des affaires avec les clients personnellement visés par les sanctions.

D’autres, comme Alimentation Couche-Tard, qui s’est installée en Russie en 2012 avec l’acquisition de 33 stations-service, n’ont pas encore annoncé de décision à cet égard. L’entreprise n’a pas répondu aux sollicitations de La Presse.

Mercredi, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, s’est dit ouvert à offrir une indemnisation financière aux entreprises canadiennes qui voient leurs activités affectées par les sanctions. Selon le rapport annuel sur le commerce d’Affaires mondiales Canada, les biens et services exportés par le Canada en Russie en 2020 ont atteint 617 millions de dollars, tandis que les importations se sont chiffrées à 1,2 milliard. À titre de comparaison, les exportations canadiennes vers les États-Unis, notre principal client et de loin, ont atteint 361,5 milliards cette année-là.

À l’échelle mondiale, l’invasion de l’Ukraine a conduit d’importantes multinationales à quitter la Russie ou à y suspendre leurs activités. Apple, Ford, Exxon et Boeing, notamment, ont récemment fait de telles annonces.