Air France n’a pas encore commencé à exploiter son premier A220 d’Airbus, mais cela n’empêche pas son président et chef de la direction Benjamin Smith d’être convaincu d’une chose : une version allongée de l’ex-C Series intéresse le transporteur aérien, qui souhaite harmoniser sa flotte.

Un peu « par erreur », lance à la blague le gestionnaire de 50 ans, la compagnie française avait fait référence à un hypothétique A220-500, un modèle pouvant accueillir davantage de passagers, dans une présentation destinée aux investisseurs en 2019.

En entrevue avec La Presse pour officialiser la prise de possession du premier A220, annoncée mercredi, celui qui s’est installé aux commandes du groupe Air France-KLM en 2018 a répété avoir mis ses cartes sur la table avec la haute direction d’Airbus.

« C’est très clair que c’est quelque chose qui nous intéresse et on a dit très clairement à Airbus que c’est le cas, a expliqué M. Smith. S’il y avait plus de différents modèles, ça aiderait. Je pense qu’ils sont ouverts. »

Air France avait annoncé, à l’été 2019, l’achat de 60 avions A220-300 (de 120 à 150 passagers), le plus gros des deux modèles actuellement offerts par Airbus, en plus d’ouvrir la porte à 60 commandes supplémentaires. M. Smith connaît bien l’appareil développé par Bombardier, puisqu’il était le numéro deux d’Air Canada quand la compagnie a annoncé l’achat de 45 C Series – un contrat qui a depuis été révisé à 33 appareils.

Le transporteur européen devrait recevoir 6 appareils cette année et environ 15 autres annuellement. Les avions assemblés à Mirabel, dans les Laurentides, serviront à remplacer des Airbus A318-100 et A319-100.

On recense 110 appareils, tous des Airbus, dans la flotte moyen-courrier d’Air France. Aux alentours de 2024, il y aura « probablement » une décision à prendre à l’égard de la deuxième partie de cette flotte (des A320-200 et A321), a expliqué M. Smith.

« Dans l’avenir, nous aimerions avoir une flotte homogène pour, par exemple, la formation de nos pilotes et toute la simplicité que cela apporte, a-t-il raconté. On doit premièrement recevoir les 60 [A220-300]. »

PHOTO FOURNIE PAR AIR FRANCE

Aux commandes d’Air France-KLM depuis 2018, Benjamin Smith aimerait voir Airbus proposer une version allongée de l’A220.

Une version allongée de l’ex-C Series fait l’objet de rumeurs depuis des années. En ajoutant des sièges, un éventuel A220-500 deviendrait un concurrent presque direct du plus lucratif des avions d’Airbus, l’A320neo (150-180 sièges). L’avion rivaliserait également plus directement avec le Boeing 737, la vache à lait du constructeur américain.

Airbus a été interrogée à maintes reprises à propos de ses intentions entourant un troisième modèle de la famille A220. La direction de la multinationale s’est toujours montrée prudente dans ses commentaires en soulignant qu’elle donnait la priorité à la réduction des coûts du programme et à l’accélération de sa cadence de production.

Dans le cadre d’une entrevue avec La Presse plus tôt ce mois-ci, le président-directeur général d’Airbus Canada, Benoît Schutz, en poste depuis le 1er septembre, avait repris le même message sans fermer la porte à une autre version de l’A220.

« La plateforme a du potentiel, avait-il lancé. Ce sont des choses qui sont de l’ordre du faisable. Les priorités, actuellement, sont la satisfaction des clients, la montée en cadence et l’amélioration de l’efficacité du programme. Cela ne veut pas dire que l’on s’interdit de réfléchir. »

L’État québécois détient 25 % de l’A220. En raison de la crise provoquée dans l’industrie aérienne par la pandémie de COVID-19, l’atteinte du seuil de rentabilité du programme toujours déficitaire a été reportée vers 2026.

Benjamin Smith sur…

L’arrivée de l’A220-300 dans la flotte d’Air France. L’avion entrera en service le 31 octobre :

« La consommation de carburant est inférieure de 20 % et l’empreinte sonore est réduire d’environ 35 % par rapport aux appareils [que l’A220] va remplacer. Côté client, c’est la première fois en presque 30 ans qu’il y a un tout nouvel appareil pour les moyens-courriers. »

La dynamique concurrentielle avec les transporteurs canadiens, qui ont reçu de l’aide financière plus tardivement :

« Le marché canadien vient juste de rouvrir pour les voyageurs internationaux. C’est vraiment tôt. Air Canada et Air Transat sont des concurrents féroces dans le marché européen. Je ne crois pas que leur approche va changer. »

La reprise dans l’industrie aérienne dans le contexte du variant Delta :

« Ce qui me donne un peu plus d’espoir, c’est qu’il commence à y avoir des carnets de vaccination acceptés par d’autres pays. Si on peut trouver des règles homogènes dans le monde [tests PCR et carnets de vaccination], je crois que cela va être très positif pour notre industrie. »

L’intérêt à l’endroit de Transat A. T., qui se cherche des partenaires commerciaux :

« Nous avons un petit partenariat avec WestJet. Sur le marché transatlantique, notre partenaire majeur, c’est Delta. En Europe, c’est probablement WestJet qui peut répondre à nos besoins. Transat, ce n’est pas un sujet pour nous actuellement. »