Les 550 travailleurs du transformateur de poulet Exceldor à Saint-Anselme, dans Chaudière-Appalaches, se sont prononcés majoritairement pour le projet de règlement déposé par la médiatrice, samedi, mettant ainsi fin à une grève de plus d’un mois.

Les membres du syndicat ont en effet voté pour l’adoption de ce règlement dans une proportion de 66 %. Une rencontre des membres avait lieu depuis le début de la journée, à Saint-Anselme. C’est donc dire que la grève prendra fin. Un protocole de retour au travail sera établi, mais selon nos informations, l’usine d’Exceldor devrait reprendre ses activités au jour 1, soit dès lundi.

« Le nouveau contrat de travail apporte non seulement plusieurs améliorations aux conditions de travail des syndiqués, mais il prévoit également des mécanismes de réparation des injustices causées à nos membres depuis 2013 », a soutenu le président du syndicat affilié aux Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), Mario Maisonneuve, en remerciant au passage l’équipe de négociation pour son travail « soutenu et acharné à la défense des droits » de ses collègues.

Ce contrat entre l’employeur et les syndiqués durera six ans, jusqu’en 2027, et sera « rétroactif » au 1er août 2020.

En vertu de l’entente, l’employeur s’engage notamment à « réparer les erreurs rencontrées depuis 2013 par certains travailleurs à la suite d’absences pour invalidité ». Cela implique, selon le syndicat, « de déterminer les sommes dues en vacances non payées ainsi que de déterminer les sommes qui ont été perçues en cotisation d’assurance collective alors qu’elles n’auraient pas dû l’être ».

En ce qui concerne les salaires, les syndiqués obtiendront des hausses de 19,75 % réparties de cette façon : 8 % rétroactif au 1er août 2020 (soit 22,37 $ l’heure) ; 6,5 % à la signature en 2021 (23,85 $) ; 0,75 % en février et août 2022 (24,03 $ et 24,21 $) ; 0,5 % en février et août 2023 (24,33 $ et 24,45 $) et 2024 (24,57 $ et 24,69 $) ; 0,88 % en février et août 2025 (24,91 $ et 25,13 $).

« Si l’indice des prix à la consommation (IPC) est supérieur aux augmentations prévues en 2022, 2023, 2024 et 2025, l’augmentation annuelle sera l’IPC pour un maximum de 2 % », indique par ailleurs le syndicat.

Une clause d’exonération de la prime d’assurance pendant un arrêt de travail pour cause de maladie ou d’accident de travail sera ajoutée au contrat d’assurance collective des travailleurs. Une somme de 10 000 $ sera par ailleurs versée dans le REER d’un travailleur de 60 ans et plus ayant acquis l’équivalent du facteur 95, soit le total de son âge plus ses années de service. L’employeur devra aussi verser 1000 $ supplémentaires dans ce REER pour « chacune des années complètes travaillées suivant l’acquisition » du facteur 95.

Mais le travail est loin d’être terminé, affirme le syndicat. Certaines conditions de travail doivent encore être améliorées, comme la climatisation et la ventilation de l’usine. « On ne veut pas jouer le même film en 2025 », a déclaré la porte-parole syndicale Roxane Larouche. En entrevue avec La Presse, elle a assuré que les travailleurs étaient « dans l’ensemble soulagés » par le dénouement de la grève, et qu’ils ne s’étaient pas sentis pressés de signer l’hypothèse de règlement.

Rappelons que près de 1 million de poulets ont été euthanasiés depuis le début de la grève à l’usine d’abattage d’Exceldor. « Les travailleurs étaient sensibles à cette réalité, mais ils étaient surtout déterminés à améliorer leurs conditions de travail. Il y a des leçons à tirer de ce conflit-là, mais je renverrais la balle dans le camp de l’employeur pour qu’il mette en place des mesures pour ce genre de situation », a poursuivi Mme Larouche.

Exceldor prête à reprendre ses activités

Dans un communiqué, la direction d’Exceldor s’est réjouie de l’« issue positive » du vote. Jeudi, l’entreprise avait déjà accepté l’hypothèse de règlement de la médiatrice, en appelant les employés syndiqués à mettre fin à la grève, qui paralysait l’abattoir de Saint-Anselme depuis le 23 mai dernier.

« Pour mettre fin au gaspillage alimentaire et assurer l’approvisionnement des marchés, la partie patronale s’était déjà rangée derrière cette proposition, même si les termes de la nouvelle convention collective auront pour effet de redéfinir le marché de la volaille au Québec », a indiqué la coopérative dans un communiqué.

Celle-ci souhaite maintenant reprendre les activités de son usine de Saint-Anselme « le plus rapidement possible ». « Il faut toutefois noter que la remise en route de l’usine de Saint-Anselme s’échelonnera sur plusieurs jours avant d’atteindre sa pleine capacité de production », a nuancé Exceldor, en assurant au syndicat son entière collaboration.

Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, n’a pas tardé à réagir samedi. Sur Twitter, il a promis que ses équipes « accompagneront les parties dans la reprise des activités ». « Maintenant, il faut regarder vers l’avenir », a ajouté l’élu caquiste, qui souhaitait un retour rapide au travail sans pour autant devoir adopter une loi spéciale à l’Assemblée nationale.

Le syndicat, lui, avait indiqué cette semaine qu’il encouragerait les 550 travailleurs de l’abattoir à voter pour l’entente. Selon les membres du comité de négociation, l’hypothèse de règlement « rejoint l’essentiel des demandes syndicales ». Plusieurs séances de discussion ont eu lieu avec la médiatrice, nommée par le ministre au début de juin. Mardi, en fin de journée, elle avait rencontré séparément les deux parties.

Plus tôt, le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, André Lamontagne, avait quant à lui qualifié la situation de « disgrâce ». « Un gaspillage comme ça dans une société éduquée et riche comme la nôtre, ce n’est pas acceptable. »

Avec Léa Carrier, La Presse