Comme son homologue américain, dont la proximité avec Boeing fait maintenant l'objet d'enquêtes, Transports Canada confie régulièrement à des employés d'entreprises privées, comme Bombardier, de certifier le travail effectué par leurs collègues.

Ce procédé, connu sous le nom de « délégation », est au coeur d'allégations ayant mené à l'ouverture d'enquêtes par le FBI, le département américain des Transports et le Congrès sur les relations entre la Federal Aviation Administration (FAA) et Boeing.

Le Seattle Times a rapporté il y a une dizaine de jours que dans le cadre de son processus de certification du 737 MAX, la FAA avait délégué à des employés de Boeing la tâche de valider que certains processus, conceptions et pièces respectaient bien ses normes, plutôt que de mandater ses propres employés.

La méthode est en place depuis des années, mais elle aurait été utilisée de façon plus prononcée dans le cas du 737 MAX, notamment pour accélérer le processus et tenter de combler le retard pris sur le rival d'Airbus, l'A320neo.

Aussi autorisé au Canada

« Transports Canada autorise des délégués à mener des activités au nom du Ministère et notamment de conclure à la conformité aux normes de conception exigées pour la délivrance d'un certificat de type », nous a répondu par courriel une porte-parole de l'organisme, une semaine après que la question a été posée une première fois.

Un « certificat de type » est le certificat qui permet à un nouvel avion de voler. Au cours des dernières années, Transports Canada en a notamment délivrés pour les deux modèles de la C Series, devenue depuis l'A220, et pour le luxueux avion d'affaires Global 7500 de Bombardier.

« Transports Canada surveille les activités des délégués qui mènent à la délivrance d'un certificat de type », ajoute l'organisme.

Un porte-parole de Bombardier a renvoyé toutes nos questions à Transports Canada, indiquant seulement que l'entreprise « suit les requis de Transports Canada ».

« Un peu différent »

Interrogé hier à Montréal, le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau, a indiqué que la différence entre les processus canadien et américain tenait en « un degré de délégation qui est peut-être un peu différent ».

Il a été impossible, jusqu'à présent, d'obtenir de Transports Canada plus de précisions sur ces différences.

Selon le ministre, le processus de certification de la C Series a nécessité plus de 200 000 heures de travail provenant d'employés de Transports Canada, en sus de celles effectuées par des employés de Bombardier agissant à titre de « délégués ».

Le processus de certification d'un avion nécessite des compétences de pointe, lesquelles sont rares. Dans des documents judiciaires déposés au cours des derniers mois au soutien d'une bataille juridique les opposant, Bombardier et Mitsubishi rappellent tous deux que cette expertise est extrêmement précieuse.

M. Garneau assure que les gens dotés de cette expertise sont suffisamment nombreux chez Transports Canada.

« Ce sont des gens très, très qualifiés, mais ils sont certainement demandés. »