C'était il y a dix ans, juste après les attentats du 11 septembre 2001. Swissair, la compagnie aérienne suisse qui faisait la fierté de tous les Helvètes, déposait son bilan, victime d'une course à la croissance effrénée et du lâchage des banques.

«C'est un triste anniversaire pour l'économie suisse et pour tout le pays», a déclaré à l'AFP Jean-Claude Donzel, qui a vécu l'événement en tant que porte-parole de la compagnie défunte, fierté de la Confédération, et qui occupe aujourd'hui les mêmes fonctions chez le successeur Swiss.

Aujourd'hui, Swiss est une compagnie florissante qui affiche des résultats positifs. Reprise par Lufthansa en 2005, Swiss a réussi à doubler ses bénéfices au premier semestre. Elle est la seule filiale de la compagnie aérienne allemande à être bénéficiaire.

Le tableau est radicalement différent de ce qu'il était il y a dix ans. Car en septembre 2001, Swissair était au bord du gouffre. La compagnie avait d'énormes problèmes de liquidités, un comble pour une société que l'on surnommait dans le milieu des transports aériens «la banque volante».

En outre, la compagnie croulait sous les dettes, conséquence de sa politique d'acquisitions effrénée et ruineuse (Sabena, AOM Air Littoral, TAP Air Portugal), qui lui a coûté 17 milliards de dollars.

Les attentats du 11 septembre ont donné le coup de grâce pour la compagnie, comme pour d'autres géants du secteur. Le trafic aérien a été paralysé pendant de nombreux jours après les attentats et Swissair s'est retrouvée à court d'argent.

Fin septembre 2001, Mario Corti, qui avait pris les commandes de Swissair six mois auparavant, avait demandé de l'aide à la Confédération et aux grandes banques suisses, pour pouvoir payer les salaires du personnel.

Les établissements financiers avaient donné leur accord, mais à condition que Swissair accepte d'être démantelée, renonce à son indépendance et passe sous la coupe de la compagnie Crossair, sa filiale beaucoup plus rentable.

C'était le projet Phénix, annoncé le 1er octobre 2001 à la presse, et considéré comme la fin de Swissair.

L'annonce de cette nouvelle a sonné comme un coup de tonnerre dans le monde du transport aérien, où Swissair jouissait d'une réputation sans tache, synonyme de qualité et de confort.

Le 2 octobre, deux avions de Swissair sont bloqués à l'aéroport de Londres parce que les droits d'atterrissage n'ont pas été payés par la compagnie helvétique.

Les avions ne peuvent plus décoller et la nouvelle se propage comme une traînée de poudre dans les aéroports du monde entier, où les fournisseurs de kérosène refusent quant à eux d'approvisionner les avions.

C'est l'immobilisation au sol, pendant deux jours interminables, de l'ensemble de la flotte de Swissair à travers le monde.

Au total, 400 vols sont annulés et 38 000 passagers sont laissés en rade, incrédules et désemparés d'avoir été lâchés par une compagnie considérée comme l'une des plus fiables au monde.

Le trafic reprend le 4 octobre, grâce à une aide de l'État suisse, mais le mal est fait. Swissair ne se remettra pas de cette débâcle.

En novembre, le gouvernement, les banques et des entrepreneurs mettent 2,2 milliards de francs suisses sur la table pour la mise sur pied d'une nouvelle compagnie nationale, à partir de Crossair.

Malgré ces efforts, Swissair disparaît définitivement le 31 mars 2002, alors que la nouvelle compagnie, appelée Swiss, prend son envol.

En 2007, 19 anciens responsables de Swissair ont été traduits en justice dans un procès fleuve, qui se terminera par la relaxe générale des inculpés et marquera la fin définitive de l'histoire de Swissair.