Les deux plus grandes firmes d'ingénierie du Québec se trouvent dans des situations très différentes en ce début de 2019, l'une luttant pour conserver son empreinte sur un marché crucial du Moyen-Orient, tandis que l'autre progresse à pas de géant.

Le groupe SNC-Lavalin a vu son action s'effondrer de plus de 27 % lundi, après avoir indiqué que les tensions diplomatiques entre le Canada et l'Arabie saoudite nuisaient à ses activités. L'entreprise a aussi évoqué des problèmes liés à un projet minier et une décision d'arbitrage défavorable entourant un projet en Australie.

WSP Global, pour sa part, a dévoilé mercredi un plan stratégique qui prévoit une croissance des revenus de plus de 10 % d'ici 2021, ce qui lui permettrait à son chiffre d'affaires d'atteindre environ 9 milliards. La prévision a fait grimper le cours de l'action de WSP de 4,8 % à 67,51 $ à la Bourse de Toronto.

L'effectif de l'entreprise montréalaise de 60 ans est passé de 17 000 employés en 2014 à 48 000 employés actuellement. Sa taille pourrait cependant dépasser celle de l'effectif de SNC et atteindre 65 000 employés au cours des trois prochaines années, selon les prévisions dévoilées mercredi.

Soutenus par des acquisitions de sociétés telles que le groupe new-yorkais d'infrastructure Parsons Brinckerhoff - et 11 acquisitions en 2017 seulement -, les plans d'expansion de WSP ne se traduisent pas par une augmentation excessive de leur niveau d'endettement, a observé Derek Spronck, analyste de RBC Dominion valeurs mobilières.

Sa valeur boursière est maintenant plus importante que celle de sa rivale, dont les bureaux sont situés sur le boulevard René-Lévesque à Montréal. Mercredi, WSP affichait une valeur d'environ 7,08 milliards, contre 6,49 milliards pour SNC à la Bourse de Toronto.

Alors que les deux entreprises ont vu leur réputation entachée par la corruption, en particulier au Québec, le nuage qui flotte au-dessus de SNC semble plus important. Ses actions ont chuté en octobre, après que les procureurs fédéraux eurent refusé de négocier un accord de réparation avec elle pour les accusations de corruption liée au régime de l'ancien dictateur libyen Mouammar Kadhafi.

En 2013, la commission Charbonneau sur la corruption dans l'industrie de la construction au Québec a permis d'apprendre que WSP - alors connue sous le nom de Genivar - et SNC-Lavalin faisaient partie d'un stratagème de truquage des offres pour l'attribution de contrats publics à Montréal dans les années 2000.

Alors que SNC intervient dans les secteurs de la construction et de l'ingénierie, WSP est une firme de services davantage tournée vers la conception technique, ce qui la rend moins vulnérable aux dépassements de coûts et aux contrats à prix forfaitaire qui peuvent miner le monde de la construction, soulignent certains experts.

« SNC était peut-être un peu trop optimiste à l'égard des projets sur lesquels il a soumissionné », a observé Karl Moore, professeur agrégé à la faculté de gestion Desautels de l'Université McGill.

« WSP joue un rôle différent - moins dans la construction et plus dans l'ingénierie - de sorte qu'il est également moins exposé aux Arabie saoudite de ce monde. »

Les dépassements de coûts annoncés lundi par SNC pour un projet minier non divulgué l'ont forcé à inscrire une dépréciation de 1,24 milliard liée à ses activités énergétiques, ont noté des analystes.

Les contrats de construction peuvent générer des profits plus importants, de façon exponentielle, que les travaux de conception, « mais ils doivent s'assurer de bien faire les choses », a ajouté M. Moore.

Ces dernières années, WSP a obtenu des contrats portant sur des projets tels que le pont indien Chenab - qui pourrait devenir le plus long pont ferroviaire du monde -, la tour de 657 étages de China Resources à Shenzhen, ainsi que la liaison ferroviaire entre Kuala Lumpur et Singapour, dont l'achèvement est prévu pour 2026.

« Au cours des trois prochaines années, grâce aux fusions et acquisitions ciblées ainsi qu'à nos stratégies de croissance interne, nous continuerons à croître en élargissant notre expertise, en termes de nombre d'employés et de compétences, ainsi qu'au niveau de la portée de nos projets, de notre présence géographique et de notre base de clients », a affirmé dans un communiqué le chef de la direction de WSP Global, Alexandre L'Heureux.