Il a promis de redémarrer les centrales au charbon, fermées par Barack Obama...

Il veut déchirer l'accord de Paris sur le climat. Et démanteler l'Agence de protection de l'environnement (EPA), qui a réussi à grandement améliorer la qualité de l'air et fait économiser des milliards en soins de santé...

Il veut « libérer » le potentiel des réserves pétrolières du pays pour réduire le coût de l'énergie...

Autant de mesures qui, promet le prochain président des États-Unis, vont donner un nouvel élan à l'économie.

Or, avant de donner suite à ses engagements électoraux, Donald Trump devrait aller faire un tour à New Delhi. Car la capitale indienne est un enfer ces temps-ci, de l'avis même de ses résidants qui étouffent dans une pollution atmosphérique record.

Bon nombre des 17 millions d'habitants de la ville en sont rendus à calfeutrer leur maison avant de se regrouper autour de purificateurs d'air pour mieux respirer, racontent des médias locaux.

Les autorités ont dû recourir à des mesures d'urgence pour contenir le problème.

Or, hormis ses effets sur la santé, cette pollution entraîne aussi des coûts énormes pour l'économie indienne.

Pollution record

La pollution de l'air n'est pas un phénomène nouveau à New Delhi, certes aussi un cas extrême dans le genre.

Mais l'air est devenu irrespirable dans cette mégalopole, asphyxiée par un épais brouillard marron.

« New Delhi est la ville la plus polluée sur Terre », affirme la chaîne CNN, dont un reporter local racontait récemment ses aventures pour trouver un masque anti-smog afin d'apaiser ses malaises... et les angoisses de sa mère.

Le gouvernement a annoncé une série de mesures d'urgence les 6 et 7 novembre : un moratoire de cinq jours sur la construction, l'arrosage des rues, la fermeture de 1800 écoles pour trois jours, le conseil de se laver les yeux régulièrement. Un million d'enfants ont été cantonnés à l'intérieur.

La raison : des fumées provoquées par les feux d'artifice pour les fêtes de Diwali (le 30 octobre) et les émanations de véhicules combinées à la chute du thermomètre. Avec le refroidissement, les polluants ne se dissipent pas.

Mais le problème est plus profond que ça. L'air à Delhi s'est dégradé avec le boom économique indien. L'urbanisation rapide entraîne une hausse des émissions de véhicules diesels, des usines et des centrales au charbon.

Respirer l'air local, 25 fois plus pollué que la limite supérieure recommandée par l'OMS, revient à fumer deux paquets de cigarettes par jour, a calculé le New York Times.

Une facture énorme

Il y aussi les coûts, variés et énormes, à cette pollution. En voici des exemples : 

- Absentéisme : l'Association des chambres de commerce de l'Inde (Assocham) affirme que, selon son propre sondage, de 5 à 10 % des travailleurs ont pris un congé dû à des problèmes respiratoires ce mois-ci ;

- Productivité en baisse : l'Assocham déplore aussi les effets de la pollution sur la productivité, des travailleurs étant souvent malades ou affaiblis ;

- Tourisme : l'air vicié pourrait nuire, au moins temporairement, à l'affluence touristique, prévient la firme Capital Economics ;

- Exode : depuis trois ans, les prix de l'immobilier à New Delhi ont chuté de 22 %, selon l'indice MagicBricks. Des courtiers attribuent en partie ce recul à l'exode de la classe moyenne qui fuit la pollution ;

- Industries : dans une note financière, la banque japonaise Mizuho redoute que la gronde populaire force le gouvernement à prendre d'autres mesures d'urgence, ce qui toucherait plusieurs industries.

La facture : en définitive, la Banque mondiale a évalué en 2013 que la dégradation de l'environnement en Inde coûte 80 milliards US par an, soit 5,7 % de l'économie (PIB). Une ponction énorme.

Un lundi noir

Lundi dernier, les travailleurs qui se rendaient au centre de New Delhi ont eu droit à un accueil pas commode.

La pollution enregistrait un taux de particules fines « PM 2.5 » (particulièrement nocives, car elles pénètrent dans le sang et les poumons) de 778 microgrammes par mètre cube d'air - l'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une dose maximale... de 25.

Évidemment, les « USA » ne sont pas l'Inde, rétorquerait Donald Trump. New York, Chicago ou Los Angeles sont en meilleur état que la capitale indienne. Mais une étude parue l'été dernier donne un aperçu des conséquences - économiques - d'une détérioration de l'environnement.

D'ici 2060, la pollution de l'air pourrait coûter 1 % du PIB mondial - soit 2600 milliards US par année, affirme l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).

Cette évaluation prend en compte les coûts de la santé, qui ont atteint 21 milliards US en 2015. Mais la facture annuelle bondira à 176 milliards US - soit huit fois plus - du fait des frais médicaux supplémentaires et des congés de maladie.

Un avertissement pour les climatosceptiques comme le nouveau leader américain.

infographie la presse