De longues files d'attente se formaient jeudi matin devant les banques indiennes pour échanger des billets après la démonétisation surprise de 24 milliards de coupures en circulation pour lutter contre l'évasion fiscale.

Les Indiens ont été pris de court par l'annonce du gouvernement mardi soir que les coupures de 500 et 1000 roupies, plus importantes valeurs faciales en circulation, n'avaient soudain plus de valeur légale afin de «briser l'emprise de la corruption et de l'argent noir».

Des centaines de millions d'Indiens se sont retrouvés avec insuffisamment d'argent liquide dans leur portefeuille pour les achats du quotidien, dans une économie où 90 % des transactions se font en argent comptant. Commerçants et chauffeurs de rickshaw refusaient de prendre les coupures démonétisées.

Après une fermeture de 24 heures pour préparer l'arrivée de nouveaux billets de 500 et 2.000 roupies, les banques ont rouvert jeudi matin pour permettre aux consommateurs de déposer sur un compte ou convertir leur argent.

«Ma principale inquiétude c'est de savoir comment me procurer les provisions essentielles pour les prochains jours vu que la plupart des gens n'ont pas de petites coupures ou les nouveaux billets», a déclaré à l'AFP R.P. Singh, un vendeur de journaux faisant la queue devant un établissement bancaire du centre de New Delhi pour échanger ses vieilles coupures contre les nouvelles.

À l'entrée d'une branche de la Yes Bank sur l'avenue Janpath, une vingtaine de personnes attendaient. Certains faisaient le pied de grue devant la porte avant même l'ouverture des locaux.

«Il y a clairement une très grosse affluence de bon matin, pour d'évidentes raisons. Tout le monde veut faire des dépôts (des billets inutilisables pour les achats) et retirer des petits billets pour s'en sortir», a commenté une employée de la banque, qui n'a pas souhaité donner son nom, car n'étant pas autorisée à parler à la presse.

Partout dans le pays, la même scène se reproduisait. Les médias montraient des images de queues impressionnantes devant les banques publiques de petites villes, qui brassent un nombre beaucoup plus important de clients.

Dans certains endroits, l'agacement gagnait la foule, irritée par des retards à l'ouverture.

«Mais qu'est-ce qu'ils font ? Pourquoi n'ont-ils pas déjà ouvert la banque ? Nous attendons depuis déjà plus de deux heures pour changer notre argent», s'est énervé un client à l'extérieur d'une banque de Modinagar, dans l'État de l'Uttar Pradesh (nord), interrogé par la chaîne ABP News.

Pour les touristes aussi, la démonétisation surprise complique singulièrement le séjour.

«J'ai dû revenir de la foire aux chameaux de Pushkar, dans le Rajasthan, parce que je n'avais pas assez de petits billets et que c'est difficile de payer en carte là-bas», a confié à l'AFP Contantz, une touriste argentine.

Si les experts anticipent une chute de la consommation dans l'immédiat, ils estiment que cette mesure entraînera sur le long terme une croissance du PIB grâce à la hausse des dépôts bancaires.