Correction brutale à la sauce américaine ; tremblement de terre dévastateur ; hausse abrupte des taux d'intérêt ; crise économique mondiale : les scénarios qui pourraient influencer à la baisse le marché immobilier canadien sont nombreux. Pour la deuxième année, la SCHL a présenté jeudi les « scénarios de crise » susceptibles de balayer le pays d'ici cinq ans - et de plomber les finances de l'organisme.

DE QUOI PARLE-T-ON ?

La Société canadienne d'hypothèques et de logement, société de la Couronne, est l'un des principaux assureurs de prêts hypothécaires au Canada. Au 30 juin dernier, la SCHL détenait des contrats d'assurance totalisant 523 milliards de dollars. Une déconfiture du marché immobilier pourrait forcer l'organisme à rembourser des sommes importantes aux différents prêteurs du pays. Pour prévenir le mieux possible les nombreux risques potentiels, la SCHL se livre depuis cinq ans à des « simulations de crise », similaires aux stress tests réalisés par les banques. Les résultats ne sont rendus publics que depuis deux ans. « C'est une question de transparence », a expliqué hier à La Presse Romy Bowers, chef de la gestion des risques.

COMME AUX ÉTATS-UNIS

Parmi les scénarios étudiés par la SCHL, on trouve celui d'une crise immobilière semblable à celle qui a frappé les États-Unis en 2008. Si une telle situation se présentait, le taux de chômage grimperait de cinq points de pourcentage (à 12 %), le prix des propriétés chuterait de 30 %, estime l'organisme. Un tel scénario se traduirait par une perte de plus de 2 milliards pour la SCHL.

HAUSSE DES TAUX D'INTÉRÊT

Une hausse brutale des taux d'intérêt - qui naviguent ces jours-ci à un creux historique - aurait aussi un impact gigantesque sur le marché immobilier. En vertu de ce scénario, les coûts d'emprunt augmenteraient de façon marquée pour les consommateurs et les institutions financières du pays. Le prix des habitations chuterait de 30 %, le chômage grimperait à 11,3 %, et au moins une banque canadienne se retrouverait en défaut de paiement. Cette situation creuserait les finances de la SCHL de 1,1 milliard.

DÉFLATION MONDIALE

Il s'agirait ici du pire scénario pour les finances de la SCHL - et, par ricochet, du Trésor canadien. Si une dépression grave et prolongée devait frapper l'économie mondiale, entraînant le Canada dans une spirale déflationniste, le taux de chômage grimperait jusqu'à 13,5 % au pays. Le prix des maisons chuterait de 25 %, et les pertes atteindraient 3,1 milliards pour la SCHL, qui serait forcée de rembourser une série de mauvaises créances.

TREMBLEMENT DE TERRE ET CHOC PÉTROLIER

Parmi les autres scénarios étudiés, il y a celui d'un tremblement de terre dévastateur qui viendrait perturber les infrastructures d'une grande ville du pays. Une telle catastrophe aurait un impact mineur sur les prix (- 0,6 %) et affecterait de façon minime les finances de l'organisme. La SCHL a aussi analysé les conséquences d'un choc pétrolier, pendant lequel le prix du baril de pétrole stagnerait entre 20 et 30 $ pendant quatre ans. Dans un tel cas, le prix des propriétés fléchirait de 7,8 %, mais les comptes de la SCHL resteraient dans le vert. La SCHL pourrait ajouter d'autres scénarios à ses simulations au cours des prochaines années, comme l'impact d'un attentat terroriste à large échelle, a confirmé hier Romy Bowers.

« PAS UNE PRÉDICTION »

La SCHL insiste : la publication de ces simulations de crise ne constitue en aucun cas « une prédiction ou une prévision ». « La simulation de crise consiste à envisager les pires scénarios très peu susceptibles de se produire et à planifier en conséquence, fait valoir Mme Bowers. Les simulations de crise rigoureuses font partie intégrante de notre programme de gestion des risques et permettent à la SCHL d'évaluer ses niveaux de capital en fonction des scénarios de crise. » La SCHL fait valoir que le niveau de capital détenu dans ses coffres serait suffisant même dans les cas extrêmes.

LES VRAIES PRÉVISIONS

Le scénario de base sur lequel planche la SCHL est à des années-lumière d'une situation de crise. L'organisme prévoit un taux de chômage maximal de 6,6 % au pays entre 2017 et 2021, avec des hausses de prix moyennes de 9 % et des résultats nets de plus de 6,4 milliards pour ses activités d'assurance prêt.