Photo Bernard Brault, La Presse

Philippe Jetté, PDG de Cogeco

Philippe Jetté occupe depuis septembre dernier le poste de PDG de Cogeco inc. et de Cogeco Communications, où il a succédé à Louis Audet qui est devenu président exécutif du conseil des deux sociétés publiques qui totalisent des revenus annuels de plus de 2,3 milliards. Le nouveau PDG nous explique comment il entend poursuivre l’expansion de Cogeco tant au Canada qu’aux États-Unis dans les secteurs des services internet, de la télé et de la téléphonie. Cogeco occupe le huitième rang des câblodistributeurs aux États-Unis et compte profiter de sa position pour accroître sa présence sur le sol américain.

Vous avez présidé récemment votre première assemblée annuelle des actionnaires, au cours de laquelle vous avez dû expliquer le recul de la profitabilité de l’entreprise en raison de problèmes avec vos abonnés du câble au Québec et en Ontario. Est-ce que la situation est maintenant rétablie ?

Les problèmes que l’on a connus au Québec et en Ontario sont liés à la modernisation de notre service à la clientèle. On était pris avec 22 systèmes de gestion de la clientèle et on a implanté une nouvelle plateforme qui nous permet d’offrir de nouveaux services en ligne sans passer par un agent de services.

C’est la mise en œuvre de cette implantation qui a généré des perturbations et des délais et qui nous a fait rater des commandes. On a perdu beaucoup d’abonnés (13 000 au premier trimestre), mais la situation est maintenant rétablie.

Durant des années, Cogeco a été reconnue pour la qualité de ses services à la clientèle et pour sa capacité à innover. La priorité est de reprendre notre leadership. Tous les efforts de marketing qui avaient été mis de côté durant la crise sont maintenant redéployés.

Avant votre nomination de septembre dernier, vous étiez président de Cogeco Peer 1, la division d’hébergement de données, qui a connu elle aussi sa part de problèmes dans le passé. Où en sont les choses aujourd’hui ?

Je me suis joint à Cogeco en 2011 à titre de chef des technologies. J’avais le mandat de générer des synergies entre nos réseaux québécois et ontarien, d’unifier les opérations et d’y apporter de la cohérence. Puis je suis devenu président de Cogeco Peer 1 en 2015.

Cette division avait été acquise en 2011 et elle a été le résultat du regroupement de sept entreprises. De 2011 à 2015, il a fallu restructurer et stabiliser l’entreprise. On a réduit de 21 à 16 le nombre des centres de données que l’on gère en Amérique du Nord et en Europe, mais ils sont tous interconnectés.

Depuis deux ans, Cogeco Peer 1 génère des flux de trésorerie positifs même si on poursuit les investissements. On doit faire face à la concurrence d’acteurs importants tels qu’Amazon et Google. Nos centres de données offrent des services gérés, contrairement aux grands acteurs, qui ne font que de la colocation.

Cela dit, on a investi beaucoup d’efforts dans ce secteur-là, qui représente 11 % de nos revenus totaux, et on regarde toutes les options qui vont se présenter.

Comment envisagez-vous le développement futur de vos opérations de câblodistribution, qui restent quand même au cœur de vos activités ?

En 2011, quand je me suis joint à Cogeco, on était une « business » de télé, internet était la deuxième activité. Aujourd’hui, internet est le premier service et la vidéo est une offre complémentaire.

On a des réseaux au Québec et en Ontario et du Maine jusqu’en Floride. La façon de croître, c’est d’ajouter des couvertures géographiques à nos réseaux existants, d’élargir nos réseaux et d’augmenter nos taux de pénétration.

Le médium physique du câble coaxial nous permet de moduler la progression de notre bande passante. On parle du 5G, mais nous, on est prêts pour accueillir le 10G.

Nos activités de câblodistribution génèrent 85 % de nos revenus. Si nos activités résidentielles sont nettement plus importantes, nos activités d’affaires affichent le plus fort pourcentage d’augmentation.

Atlantic Broadband, la division américaine de Cogeco, a acquis il y a deux ans le câblodistributeur MetroCast, ce qui vous a permis d’augmenter considérablement votre présence aux États-Unis. Quelles sont vos visées pour le marché américain ?

Le marché canadien est passablement consolidé, alors qu’aux États-Unis, on recense 900 opérateurs dans la câblodistribution.

On occupe le huitième rang en importance aux États-Unis et les entreprises qui nous intéressent n’ont pas une taille suffisante pour intéresser les gros opérateurs tels que Comcast ou Charter.

On est un acheteur intéressé et il s’agit de trouver des vendeurs intéressés. On regarde du côté des entreprises qui n’ont plus envie d’investir dans les cycles technologiques ou celles qui ont des enjeux de transfert générationnel.

Vous avez récemment fait l’acquisition de 23 licences de spectres de téléphonie sans fil au Québec et en Ontario. Est-ce que vous préparez une prochaine offensive dans la téléphonie sans fil ?

C’est un secteur d’activités complémentaire qui nous intéresse. On aimerait ajouter des services de couverture régionale dans le sans-fil là où on a une présence dans le filaire. C’est une option où l’on pense pouvoir offrir un bon service à un bon prix. C’est une éventualité que l’on étudie.

Votre division Cogeco Média a effectué l’acquisition des 10 stations régionales qui appartenaient à RNC Média. Est-ce que l’intégration se réalise comme vous le souhaitiez ?

Les 10 stations de RNC Média étaient concentrées principalement en Abitibi et au Lac-Saint-Jean, et une fois combinées à nos 13 stations, cela nous assure une très bonne couverture sur l’ensemble du Québec.

Les médias traditionnels sont affectés par la baisse des revenus publicitaires et la radio n’y échappe pas. Mais comme on a une position dominante dans plusieurs marchés, on réussit à compenser les marchés où la situation est plus difficile.