Il est question de l'éliminer depuis au moins 20 ans et le gouvernement conservateur a tranché: la «cenne noire» a assez vécu. La production de la pièce de 1 cent cessera à l'automne.

Selon le ministre des Finances Jim Flaherty le gouvernement canadien aurait dû prendre cette décision il y a longtemps. «Les pièces de 1 cent prennent trop de place sur la commode, a-t-il lancé dès le début de son discours budgétaire. La production de chaque pièce de 1 cent coûte 1,6 cent aux contribuables. Nous allons donc cesser d'en fabriquer.»

D'abord, cette décision fera économiser 11 millions de dollars à la Monnaie royale canadienne. La société d'État s'acquitte du même coup de son obligation de réduire ses dépenses, comme tous les autres organismes fédéraux.

Ensuite, les économies pourraient atteindre 150 millions par année pour les institutions financières, les détaillants et les consommateurs, qui n'auront plus à manipuler, à transporter et à changer des pièces dont la valeur ne cesse de diminuer.

Officiellement, le cent demeurera l'unité de base de tous les paiements. Seules les transactions réglées en espèces verront leur total arrondi à 5 cents près, en plus ou en moins. Les autres types de paiements - chèques, cartes de crédit ou cartes de débit - continueront de comptabiliser les sommes au cent près.

En principe, donc, les consommateurs pourront continuer d'utiliser leurs cents indéfiniment. Dans les faits, toutefois, ils s'en débarrasseront, prévoit François Dupuis, économiste en chef du Mouvement Desjardins, qui a publié deux études sur le sujet. «C'est ce qui s'est passé en Nouvelle-Zélande et dans les autres pays qui ont abandonné leurs pièces les plus petites», a-t-il expliqué à La Presse.

Dans le cas du cent canadien, qui est de plus en plus délaissé par les consommateurs, cela pourrait se produire assez vite, selon lui.

Ottawa s'attend en tout cas à ce que les Canadiens laissent tomber complètement le cent. Le gouvernement les invite à donner leurs sous noirs à des organismes de bienfaisance. Une fois récupérées par les institutions financières, les pièces seront fondues et le métal qui les compose sera recyclé.

Crainte et nostalgie

Ce n'est pas un hasard si le gouvernement conservateur a choisi d'abolir le cent dès le premier budget de son mandat majoritaire. Les questions liées à la monnaie ont un côté émotif qu'un gouvernement évite généralement à la veille d'élections.

Ceux qui s'opposent à l'abandon de la pièce de 1 cent sont un peu nostalgiques, un peu conservateurs, et généralement très inquiets de voir les prix grimper.

Or, l'expérience démontre que l'abandon des pièces de moindre valeur n'a pas d'effet inflationniste sur les prix, selon l'économiste de Desjardins.

L'abandon de la pièce de 1 cent ne devrait pas non plus avoir d'effet sur les pratiques des détaillants, qui pourront continuer à annoncer un produit à 9,99$, croit François Dupuis.

La pièce de 5 cents. Elle pourrait être éliminée, croit M. Dupuis, à mesure que son pouvoir d'achat diminuera et que les coûts pour la produire augmenteront.