Le groupe semencier et de biotechnologies américain Monsanto a renoncé mercredi à racheter son concurrent suisse Syngenta face au refus de ce dernier d'accepter une proposition qui aurait créé un géant des semences agricoles.

Syngenta, née en 2000 de la fusion des activités dans l'agrochimie du Britannique AstraZeneca et du Suisse Novartis, avait rejeté à plusieurs reprises depuis mai les avances de Monsanto qui avait porté récemment son offre à 470 francs suisses par action pour tenter de vaincre ses résistances.

«Syngenta a fait savoir que la proposition améliorée de Monsanto ne répondait pas aux attentes financières de Syngenta», a indiqué le groupe américain dans un communiqué en précisant que, dans ces conditions, «il n'allait pas poursuivre sa proposition pour une combinaison avec Syngenta».

Monsanto a confirmé qu'il avait transmis le 18 août une proposition encore améliorée évaluant Syngenta à 470 francs suisses par action, dont 245 francs suisses en numéraire, au lieu de 449 francs suisses précédemment. Cela portait le montant total à 46 milliards de dollars et aurait offert aux actuels actionnaires du groupe suisse 30% de la nouvelle entité.

Cette offre augmentait également le dédommagement en cas d'échec de la fusion avant sa finalisation («break-up fee») à 3 milliards de dollars au lieu de 2 milliards précédemment.

«Mais, faute de recevoir un engagement constructif de Syngenta, Monsanto va continuer de se concentrer sur ses opportunités de croissance sur la base de ses propres activités pour apporter à l'agriculture une nouvelle vague d'innovations», indique le communiqué.

Syngenta a réagi à la décision de Monsanto en indiquant mercredi qu'il avait rejeté la dernière offre, car «elle sous-évaluait de manière importante l'entreprise et comportait beaucoup de risques».

«Même pas une tasse de café»

Le président du Conseil d'administration du groupe suisse, Michel Demaré, n'avait pas mâché ses mots au sujet du groupe américain dans des déclarations fin juillet.

«Comprenez: c'est la troisième fois que Monsanto vient frapper à notre porte», avait-il lancé. «Si vous avez une belle maison et que quelqu'un veut l'acheter à un prix qui ne reflète pas sa valeur, la première fois vous dites gentiment non, merci. La deuxième fois, aussi. Mais la troisième fois, vous n'offrez même pas une tasse de café», avait-il dit. «On en est là».

Selon le patron de Syngenta, Michael Mack, qui s'exprimait à la même occasion, l'intérêt de Monsanto s'expliquait par la stratégie intégrée mise en oeuvre par Syngenta, qui consiste à vendre sous un même toit les semences et les produits de protection des cultures.

«Ils n'ont nulle part où aller», avait-il déclaré à l'adresse de Monsanto, ajoutant qu'il ne voyait «pas de raison pour laquelle Syngenta serait obligée de les aider».

Mais c'est Syngenta qui semblait mercredi faire les frais de son refus. Le cours de l'action Monsanto bondissait sur la Bourse de New York de 7,1% à 95,78 dollars alors que les actions Syngenta, cotées à Zurich et à New York, s'effondraient sur cette dernière place de 11,5% à 69,14 dollars vers 11h40.

Monsanto est célèbre pour ses semences génétiquement modifiées, notamment le maïs. Syngenta est également présente dans les OGM, dans maïs, le riz et le soja.

Le groupe américain, basé à Saint Louis (Missouri, centre) est aussi connu pour ses produits de protection des cultures et les herbicides, comme le Round-up alors que Syngenta commercialise le Cruiser, accusé par les défenseurs de l'environnement de tuer les abeilles.

Monsanto cherchait, en tentant d'acquérir Syngenta, à se développer l'agriculture analytique et la gestion des risques. Ceux-ci portent sur le développement de technologies permettant d'obtenir des informations fiables (qualité des terres...) pour aider fermiers et agriculteurs à améliorer leurs récoltes.

Mais les réticences du groupe suisse s'appuyaient également sur ses craintes de voir les autorités de la concurrence retoquer l'opération, Monsanto occupant la place de numéro un mondial des semences tandis que Syngenta se classe en troisième position dans ce secteur et au premier rang pour les produits de traitement des récoltes.