Le porc n’était pas au menu des discussions qui se sont mal terminées récemment à Bali entre le premier ministre du Canada et le président de la Chine. Mais l’animal est depuis longtemps au centre des relations entre les deux pays, pour le meilleur et pour le pire.

La Chine est le premier producteur mondial de porcs. Le premier consommateur aussi. Les Chinois, qui sont 1,42 milliard, consomment environ 30 kg de viande de porc par personne par année. Au Canada, la consommation annuelle de porc par habitant est estimée à 19 kg.

Le porc est si important dans l’alimentation chinoise que le régime au pouvoir s’est toujours assuré de ne jamais en manquer. Le gouvernement peut puiser dans sa réserve nationale de viande de porc congelée au besoin et la mettre sur le marché, pour limiter la grogne de la population lorsque les prix au détail augmentent.

Le cheptel porcin chinois a été décimé par la fièvre porcine en 2019 et la Chine a dû importer davantage. Le Canada et le Québec, qui sont de gros producteurs de porcs, en ont profité. En 2020, les exportations canadiennes de porcs en Chine ont triplé par rapport à l’année précédente.

Le porc est donc important aussi pour le Canada. Il est une cible de choix quand le gouvernement chinois veut exprimer son insatisfaction envers les politiques canadiennes comme ç’a été le cas lors de l’affaire Huawei.

Depuis l’épidémie de fièvre porcine qui a accru sa dépendance aux exportations, la Chine a pris les grands moyens pour augmenter sa production de porcs. Un genre d’élevage de type nouveau, qu’on a appelé « hôtel à cochons », est appelé à se multiplier pour remplacer les petites fermes traditionnelles disséminées sur le territoire.

Porcheries nouveau genre

Le plus important de ces élevages nouveau genre vient d’être inauguré dans la ville d’Ezhou, dans l’est du pays. L’immeuble peut abriter 25 000 porcs à chacun de ses 26 étages et produire 54 000 tonnes de viande par année. D’autres constructions de ce type devraient voir le jour à moyen terme.

Ces mégaporcheries pourraient permettre à la Chine d’augmenter considérablement sa production avec une utilisation optimale des ressources nécessaires à l’élevage, comme le territoire, l’eau et les céréales.

Aujourd’hui comme hier, la sécurité alimentaire reste un défi pour la Chine. Le président Xi Jinping peut se vanter du fait que les 400 millions de Chinois qui ne pouvaient pas manger à leur faim avant la révolution sont aujourd’hui 1,4 milliard de personnes bien nourries. Mais les Chinois quittent massivement la campagne pour la ville et la production agricole s’en ressent.

Les investissements massifs dans la production porcine à la fine pointe de la technologie visent à augmenter jusqu’à 95 % l’autosuffisance de la Chine en viande de porc.

Déjà, les principaux pays producteurs de viande de porc prévoient une baisse des exportations globales vers la Chine, en raison de l’augmentation de la production locale.

Étant donné l’état des relations entre le Canada et la Chine, le porc canadien ne sera pas le premier choix de la Chine si elle doit continuer d’en acheter à l’étranger pour nourrir sa population.

La Stratégie indopacifique du gouvernement Trudeau, qui veut s’éloigner de la Chine et se rapprocher d’autres pays d’Asie, ne fera rien pour améliorer les choses. Ce n’est pas une bonne nouvelle pour le Québec, qui produit la moitié de tous les porcs canadiens. Ni pour Olymel.