(Ottawa) La banque centrale du Canada a prévenu mercredi que la hausse du coût de la vie se poursuivrait l’année prochaine, mais a signalé qu’elle n’était pas encore prête à tirer sur son principal levier pour maîtriser l’inflation.

L’inflation annuelle est passée à 4,7 % en octobre, un sommet depuis le début de la pandémie et sa plus forte croissance en 18 ans.

La Banque du Canada a indiqué que l’inflation resterait élevée au premier semestre de l’année prochaine, mais qu’elle devrait revenir au second trimestre dans la zone de confort de la banque centrale, qui se situe entre 1,0 % et 3,0 %.

D’ici la fin de l’an prochain, la banque prévoit que l’inflation annuelle ralentira à 2,1 %.

Alors que la trajectoire de l’inflation et de l’économie suit largement les attentes de la banque centrale, celle-ci a assuré mercredi, dans un communiqué, qu’elle surveillait de près « les attentes d’inflation et les coûts de main-d’œuvre pour s’assurer que les forces faisant grimper les prix n’ont pas, en fin de compte, une influence durable sur l’inflation ».

La banque centrale, qui procédait mercredi à sa dernière annonce de politique monétaire pour 2021, a laissé son taux directeur à sa valeur plancher de 0,25 %, où il se trouve depuis le début de la pandémie de COVID-19.

Dans une déclaration, la Banque du Canada a indiqué que son conseil de direction ne s’attendait pas à hausser son taux directeur avant le deuxième ou le troisième trimestre de l’an prochain. Cette projection est la même que lors de sa dernière décision à ce sujet.

« Dans l’ensemble, la (Banque du Canada) a effectivement résisté à la tentation de cracher dans la soupe », a écrit Derek Holt, responsable des études des marchés des capitaux à la Banque Scotia, dans une note. « Ils ont maintenu le cap, avec des prévisions pour commencer à envisager des hausses de taux dès avril prochain. »

Des hausses rapides en 2022 ?

Lorsque la banque se décidera à bouger, il est probable qu’elle agisse rapidement, avec dynamisme, a estimé l’économiste en chef de la Banque de Montréal, Douglas Porter. La banque a déjà augmenté rapidement son taux après une période d’urgence par le passé, a-t-il souligné en évoquant la possibilité de voir quatre hausses de taux d’ici la fin de 2022.

« Lorsque la Banque du Canada estime que les taux d’intérêt doivent augmenter, elle n’a pas tendance à attendre, elle a tendance à évoluer relativement rapidement », a affirmé M. Porter.

Selon la banque centrale, des indicateurs économiques récents donnent à penser que l’économie a connu un « essor considérable » au début du quatrième trimestre. Statistique Canada a indiqué la semaine dernière que l’économie avait crû au taux annualisé de 5,4 % au cours du troisième trimestre, ce qui est légèrement inférieur à ce que la banque centrale avait prévu en octobre.

Dans son communiqué, la banque centrale a indiqué que la croissance avait ramené l’activité économique à environ 1,5 % de son niveau du dernier trimestre de 2019, avant l’arrivée de la pandémie de COVID-19.

De même, le marché du travail a offert une meilleure performance que prévu en novembre, faisant grimper la proportion de travailleurs du principal groupe d’âge avec un emploi à un sommet historique. Le taux de chômage ne se situe plus qu’à 0,3 point de pourcentage de son niveau prépandémique de février 2020.

Malgré tout, la banque a noté que les vents contraires liés aux inondations dévastatrices en Colombie-Britannique et certaines incertitudes par rapport au nouveau variant Omicron du virus causant la COVID-19 « pourraient peser sur la croissance en aggravant les perturbations des chaînes d’approvisionnement et en réduisant la demande de certains services ».

L’économiste Sri Thanabalasingam, de la Banque TD, a indiqué que la banque pourrait réagir plus tôt si Omicron se révélait moins dangereux pour la santé qu’on ne le craignait initialement. Selon lui, l’économie pourrait absorber cette décision « avec une inflation qui monte et un marché du travail assis sur de solides bases ».

Une hausse des taux aurait un impact sur les intérêts perçus sur les prêts hypothécaires à taux variable, ce qui pourrait resserrer les finances des ménages qui, au cours de l’année 2021, ont ajouté 121,5 milliards de dettes hypothécaires, dont 38 milliards entre juillet et septembre.

« Cela va être, je pense, particulièrement problématique pour les Canadiens qui ont contracté des hypothèques assez importantes, en particulier parce que les taux d’intérêt sont bas depuis si longtemps », a observé Tashia Batstone, présidente de FP Canada, une association de planification financière.

« Ce que cela signifie, c’est que les Canadiens devront travailler plus dur pour respecter leur budget, ils devront surveiller la dette qu’ils contractent, et en particulier s’attendre à ce qu’ils ne puissent pas avoir autant de flexibilité en matière de prêts hypothécaires. »