(Washington) Joe Biden a reconduit Jerome Powell à la tête de la banque centrale américaine (Fed), offrant la place de numéro deux à Lael Brainard, qui était poussée par l’aile gauche des démocrates, marquant ainsi une volonté de continuité et de consensus au sein de son parti.

Jerome Powell est « la bonne personne » pour guider la Fed, a estimé Joe Biden lors d’un discours à la Maison-Blanche, en compagnie de M. Powell et de Mme Brainard, au moment où les États-Unis affrontent leur pire poussée inflationniste depuis 30 ans.

« Nous avons besoin de stabilité et d’indépendance à la Réserve fédérale », a souligné le président américain. Il a ainsi salué l’action de « Jay » Powell, un républicain, au cours des quatre dernières années, et notamment la manière dont il avait résisté aux attaques régulières de l’ancien président Donald Trump à son encontre.

« Ce n’est qu’une des nombreuses raisons pour lesquelles Jay bénéficie du soutien de tous les horizons politiques », a souligné Joe Biden, estimant « important d’avoir une direction de la Fed qui bénéficie d’un large soutien bipartite ».

Avec la nomination d’un républicain comme président de la Fed et d’une démocrate comme vice-présidente, Joe Biden espère ménager les différentes sensibilités de son parti, en pleines négociations pour l’adoption au Congrès de son plan de réformes sociales et environnementales.

Cette nomination est une des décisions économiques les plus importantes du mandat du président des États-Unis. Très attendue, elle avait toutefois revêtu, cette fois-ci, un aspect politique plus qu’économique.  

Le Sénat va désormais auditionner les deux responsables, puis voter pour confirmer ou non leurs nominations, d’abord en commission bancaire puis en séance plénière.  

Changement climatique

Jerome Powell a assuré lundi que la Fed agirait pour que l’inflation ne « s’enracine pas ». Il a aussi fait état de la priorité de lutter « contre l’évolution des risques liés au changement climatique », un changement de ton qui semble lui avoir été dicté par la Maison-Blanche.

Joe Biden a en effet estimé que la banque centrale américaine devait être « leader » dans la prise en compte de ce risque, répondant aux appels de l’aile gauche des démocrates, qui appelaient à ne pas reconduire Jerome Powell en raison de son action jugée trop faible dans ce domaine.

Lael Brainard, en revanche, en avait fait l’une de ses thématiques de prédilection. Elle a, lors de discours, évoqué le combat à mener contre l’inflation, mais aussi la nécessité de « soutenir une croissance économique qui inclue tout le monde », et une économie « durable pour les générations futures ».

Mais certains sénateurs ont regretté le choix de Joe Biden, comme les démocrates Sheldon Whitehouse et Jeff Merkley, pour qui le président de la Fed doit veiller à la « protection de notre système financier, et (partager) le point de vue de l’administration selon lequel la lutte contre le changement climatique relève de la responsabilité de chaque décideur politique ».

PHOTO SUSAN WALSH, AP

Lael Brainard a, lors de discours, évoqué le combat à mener contre l’inflation, mais aussi la nécessité de « soutenir une croissance économique qui inclue tout le monde », et une « économie (qui) soit durable pour les générations futures ».

« Cette personne n’est pas Jerome Powell », ont-ils déploré lundi dans un communiqué.

La sénatrice Elizabeth Warren a même annoncé qu’elle voterait contre sa reconduction, évoquant ses « échecs en matière de réglementation, de climat et d’éthique ».

Diversité

« J’ai confiance en eux et je pense qu’ils bénéficieront d’un large soutien du Congrès et de la population », a commenté sur la chaîne CNBC la secrétaire au Trésor et prédécesseure de Jerome Powell à la tête de la Fed, Janet Yellen.

Jerome Powell, 68 ans, dirige la Fed depuis 2018. Cet avocat et ancien banquier d’affaires multimillionnaire en avait été nommé gouverneur par Barack Obama en 2012, puis promu président par Donald Trump en 2017. Il devrait bénéficier d’un soutien suffisamment large au Sénat.  

Lael Brainard, 59 ans, est moins consensuelle, et est notamment favorable à une règlementation bancaire et financière stricte. Elle remplacera l’actuel vice-président de la Fed Richard Clarida, dont le mandat expire le 31 janvier.

D’autres nominations devraient être annoncées début décembre, notamment pour un poste-clé de l’institution, celui de vice-président chargé de la supervision bancaire. La Maison-Blanche a promis lundi « plus de diversité ».

La Fed, qui est la plus puissante banque centrale du monde, décide de la politique monétaire du pays, et surveille et régule le secteur financier. Ses décisions peuvent doper ou ralentir l’activité économique américaine en fixant le coût du crédit, influer sur le dollar et par là sur tous les marchés financiers.