(Paris) Les banques européennes seraient en mesure d’encaisser sans trop de casse une grave crise économique marquée par une lourde chute de leurs réserves financières, d’après le résultat d’un vaste test de résistance publié vendredi par l’Autorité bancaire européenne.

Dans le scénario du pire retenu pour ce test, qualifié de « très sévère » et couvrant une période de trois ans, le secteur bancaire européen subirait une dégradation de son capital de 265 milliards d’euros à l’horizon 2023, a fait savoir l’autorité dans un communiqué.

Ce scénario du pire étudie les effets d’une période prolongée de crise sanitaire de la COVID-19 couplée à un environnement de taux « plus bas pour plus longtemps », avec comme point de départ l’année 2020 marquée par un environnement économique déjà dégradé.

En pratique, cette situation se traduirait par une chute du produit intérieur brut de l’Union européenne de plus de 3 % sur trois ans, avec un repli généralisé dans tous les pays.

À l’issue d’un tel choc, le ratio de fonds propres « durs », indicateur clé de mesure de la solidité financière, passerait pour l’ensemble du secteur bancaire européen de 15 % à environ 10 %, un niveau globalement considéré comme acceptable par les superviseurs après trois années de stress.

Vingt banques sous 10 %

Ce niveau constitue toutefois une moyenne : au total, vingt banques sur les cinquante testées tomberaient sous la barre de 10 % à l’issue des trois ans, montrent les données de ce test mené conjointement avec la Banque centrale européenne.

L’établissement italien Monte dei Paschi di Siena, en difficulté de longue date et en passe d’être racheté par UniCrédit, ferait même face à des fonds propres négatifs, de -0,10 %.

En outre, certaines subiraient de très lourdes pertes, à l’image de l’allemande Deutsche Bank qui afficherait fin 2021 une perte de plus de 10 milliards d’euros, la française BNP Paribas une perte de 11 milliards ou encore l’espagnole Santander une perte de plus de 5 milliards.

Mais de manière générale, les établissements européens se révèlent « robustes » et « ont généralement bien réussi le test », a affirmé Luis De Guindos, le vice-président de la BCE, dans une interview au quotidien allemand Handelsblatt publiée vendredi.

Dans le détail, ce test masque des situations hétérogènes parmi les banques : la dégradation du capital serait plus marquée au sein des établissements peu diversifiés à l’international et pour ceux disposant de revenus d’intérêt plus faibles, a précisé l’Autorité bancaire européenne.

Le poids des pertes sur crédit

Comme lors des précédents tests, les pertes sur crédit ont été responsables de la majeure partie de la dégradation du capital. Les plus lourdes ont été mesurées en France, talonnée par l’Allemagne et l’Italie.

Le scénario examiné entraînerait également une diminution importante des bénéfices, en particulier une baisse plus importante des revenus tirés des intérêts que celle mesurée lors de précédents exercices.

« Les hypothèses retenues ont été d’une sévérité inouïe », grince toutefois un patron de banque, qui ne souhaite pas être identifié.  

« Ce test a un côté un peu artificiel, où l’on fait par exemple comme si dans une crise centennale on continuait à distribuer du crédit comme si de rien n’était », ajoute cette même source.

Initialement prévu en 2020, ce test avait été reporté en 2021 en raison de la pandémie mondiale de la COVID-19. Lancé en janvier, il couvre 50 établissements de quinze pays en Europe, représentant 70 % des actifs du secteur bancaire européen.

L’Autorité bancaire européenne précise que ce test n’a pas été conçu pour déterminer si telle ou telle banque a réussi ou échoué. En revanche, les données récoltées serviront aux superviseurs bancaires européens pour évaluer les besoins en capitaux des établissements bancaires sous leur surveillance ces prochains mois.