(Washington) Voitures d’occasion, billets d’avion, ou encore meubles ont vu leurs prix bondir aux États-Unis en avril, une inflation bien plus forte que prévu susceptible de compliquer la tâche de Joe Biden, qui veut faire adopter de gigantesques plans d’investissement.

Cela faisait 13 ans que les prix n’avaient pas autant augmentés d’une année sur l’autre, +4,2 % en avril par rapport à avril 2020, selon l’indice CPI publié mercredi par le département du Travail.

Il y a un an en effet, le plongeon de la demande, sous l’effet des premières mesures de confinement liées à la COVID-19, avait fait chuter les prix, ce qui crée un effet de comparaison disproportionné.

Mais le mouvement ne s’arrête pas là, puisque l’inflation s’accélère aussi d’un mois sur l’autre (+0,8 % par rapport à mars).

Une des raisons est « une “normalisation” des prix dans certains secteurs durement touchés par la pandémie », selon les conseillers économiques de la Maison-Blanche, qui citent « les tarifs des compagnies aériennes (qui) ont augmenté de 10,2 % d’un mois à l’autre, mais […] restent bien en deçà de leur niveau d’avant la pandémie ».

À cela s’ajoute le fait que les Américains, désormais largement vaccinés, ouvrent plus grand leurs porte-monnaie, remplis avec les aides du dernier plan de relance du gouvernement adopté en mars.

Au même moment, l’industrie connaît, au niveau mondial, d’importantes difficultés d’approvisionnement, qui font augmenter les prix depuis la fabrication jusqu’à la livraison.

Durable ou temporaire ?

Les républicains pourraient se saisir de cet argument pour s’opposer avec une virulence redoublée aux plans d’investissements de Joe Biden, arguant que cela risque d’emballer la machine.

Le président américain a en effet présenté deux plans distincts : un premier « pour les familles américaines » de 1800 milliards de dollars sur 10 ans, un autre sur les infrastructures, de 2000 milliards de dollars sur huit ans.

Or, si la hausse de l’inflation se prolongeait trop, elle pourrait encourager la Banque centrale américaine (Fed) à augmenter ses taux plus vite que prévu. Une mauvaise nouvelle pour Joe Biden, qui compte financer une partie de ses plans par de la dette, dont le coût serait alors plus élevé.

Le président de la Fed Jerome Powell a toutefois indiqué à de multiples reprises qu’il n’était pas encore temps d’y penser, afin justement de ne pas entraver la reprise économique.

Cependant, à l’instar des responsables de la puissante institution, nombre d’économistes pensent que l’inflation devrait n’être que temporaire.

Bond des prix des voitures d’occasion

« J’ai été surpris. Ces chiffres sont bien supérieurs à ce que j’attendais, et aux prévisions des analystes », a reconnu le numéro deux de la Fed Richard Clarida, lors d’une conférence virtuelle.

Il s’attend toutefois à ce que l’inflation se stabilise, dès 2022, autour de l’objectif de 2 % à long terme que vise la Fed.

Dans l’immédiat toutefois, les entreprises sont nombreuses à augmenter leurs prix, ou prévoir de le faire.

Whirlpool fera par exemple payer ses appareils électroménagers de 5 % à 12 % plus cher, tandis que Coca-Cola va tenter la méthode douce, par exemple en proposant des canettes plus petites, mais vendues au même tarif.

D’autant plus que les salaires grimpent aux États-Unis, les entreprises utilisant ce levier pour attirer ou retenir des employés tentés de profiter des allocations chômage généreuses pour être plus sélectifs dans leurs candidatures.

En avril, les prix des voitures d’occasion ont tout particulièrement bondi, enregistrant par rapport à mars la hausse la plus élevée jamais enregistrée. Cela représente même un tiers de l’inflation mensuelle.

Car les Américains, désormais adeptes du télétravail, continuent à s’éloigner des centres-villes, ce qui accroît le besoin d’acheter un ou plusieurs véhicules, au moment même où la pénurie de puces électroniques ralentit fortement la production de voitures neuves.

Les prix ont également augmenté pour les nuits d’hôtel, les billets d’avion, les loisirs, les assurances automobile, et l’ameublement, détaille le département du Travail.

Les prix de l’essence, notamment responsables de l’inflation des derniers mois, n’y sont cette fois-ci pour rien, ils ont même reculé par rapport à mars (-1,4 %).

Résultat, en excluant les prix volatils de l’énergie et de l’alimentation, l’inflation dite sous-jacente est de 0,9 % sur un mois-la plus forte hausse depuis avril 1982. Elle est de 3 % sur un an.