Le budget provincial déposé jeudi par Québec est fortement teinté par les dépenses liées à la pandémie de COVID-19 et au réseau de la santé. Pour la prochaine année, Québec investit 2,9 milliards en santé, entre autres pour financer les mesures en lien avec la crise sanitaire, comme l’achat de matériel de protection, la vaccination et le salaire des 10 000 nouveaux préposés aux bénéficiaires promis dans le réseau. Le gouvernement presse encore Ottawa d’augmenter ses transferts fédéraux en santé pour faire face à la crise sanitaire et au vieillissement de la population.

Les dépenses en santé atteindront 47,1 milliards en 2021-2022 au Québec, de loin le poste de dépenses le plus important du gouvernement. Les dépenses seront toutefois en baisse de 3,9 % par rapport à l’an dernier. En 2020-2021, les dépenses en santé ont explosé à cause de la pandémie et se sont élevées à 49 milliards de dollars. Si on exclut les mesures mises en œuvre dans le cadre de la crise sanitaire, l’augmentation des dépenses en santé s’élèvera à 5,3 % en 2021-2022.

Croissance des dépenses en santé au Québec

2019-2020 : 6,6 %

2020-2021 : 5,3 %

2021-2022 : 5,3 % (si on inclut les mesures mises en œuvre dans le cadre de la crise sanitaire, la croissance est de - 3,9 %)

Pour vaincre la crise sanitaire

Ce sont 10,3 milliards de plus qui seront injectés en santé d’ici cinq ans par Québec. En 2021-2022, Québec investit 2,3 milliards pour vaincre la crise sanitaire.

Les différentes mesures mises en place durant la pandémie, comme l’embauche massive de préposés aux bénéficiaires, les primes versées aux travailleurs en zone rouge et l’embauche de gestionnaires en CHSLD, coûteront 16 milliards d’ici 2025-2026 au gouvernement. Plus de 2,7 milliards ont été dépensés jusqu’à maintenant en équipement de protection pour les travailleurs de la santé. Mais le ralentissement des activités chirurgicales, qui a fait exploser les listes d’attente, aura toutefois généré une baisse des dépenses totalisant 4,1 milliards. Ainsi, le coût des actions pour surmonter la crise sanitaire depuis mars 2020 s’élève à 11,9 milliards.

Dans le budget, le gouvernement annonce qu’un plan de rattrapage des interventions chirurgicales est en préparation. « Ce plan d’action visera à éliminer le retard lié à la pandémie en matière de chirurgies et d’examens diagnostiques sur un horizon de 18 à 24 mois », écrit-on.

Porte-parole du deuxième groupe de l’opposition en matière de finances, Vincent Marissal déplore que le budget ne comporte « aucun signe d’espoir » pour « celles et ceux qui ont tenu le Québec à bout de bras » depuis un an. Le député de Québec solidaire qualifie l’annonce du financement des 10 000 nouveaux postes de préposé aux bénéficiaires de « réchauffée ». Il indique que les infirmières sont toujours sans convention collective depuis un an, que le décret 007 limitant leurs vacances est toujours en vigueur et que les heures supplémentaires sont toujours omniprésentes. Ce budget est une « gifle de plus pour ces gens à qui on dit essentiellement d’attendre ».

Combien ?

7 milliards sur 5 ans

2,3 milliards en 2021

Pour renforcer les services aux aînés

Le budget prévoit d’investir 316,5 millions de dollars cette année pour renforcer les services aux aînés, notamment en bonifiant les soins à domicile. Des sommes seront aussi investies afin de soutenir les résidences privées pour aînés, dont beaucoup ont fermé leurs portes ces dernières années, peut-on lire dans le budget. De l’aide financière sera offerte pour deux ans, dès avril 2021, afin de « réduire l’impact des hausses de primes d’assurance » des résidences privées pour aînés.

Québec financera aussi certains travaux de mise aux normes de ces établissements. Les résidences de plus petite taille pourront être financées jusqu’à 80 %, alors que les grandes résidences de 200 à 249 unités ne seront financées qu’à 20 %.

Dans son Plan québécois des infrastructures (PQI) 2021-2031, le gouvernement investit 3,1 milliards de dollars dans l’ajout de maisons des aînés et dans la construction et la réfection de CHSLD et d’hôpitaux. Québec annonce l’ajout de 500 places d’hébergement en CHSLD, en attendant que les maisons des aînés soient construites.

Des projets de construction de nouveaux CHSLD sont en phase de planification, selon le PQI, dont un à Lachute, à LaSalle et à Saint-Charles-Borromée. D’autres seront reconstruits, comme le CHSLD Denis-Benjamin-Viger et le CHSLD Jeanne-Le Ber.

Combien ?

2 milliards sur 5 ans

316,5 millions en 2021

Pour renforcer les services aux aînés

Pour rehausser les soins et les services en santé

Québec investit aussi 264,2 millions cette année pour améliorer l’accès aux soins de première ligne et pour rehausser les services aux personnes vulnérables et en santé mentale.

Le budget indique qu’au Québec, près de 650 000 personnes sont en attente d’un médecin de famille. Celles-ci attendent en moyenne un an et demi pour se faire recommander un médecin de famille. Le gouvernement compte créer des guichets d’accès de première ligne pour les personnes toujours en attente d’un médecin de famille. Ces guichets permettront à la population d’avoir accès à un professionnel de la santé « à l’intérieur d’un délai de 36 heures ».

Le budget a été accueilli froidement par les syndicats en santé. L’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) déplore que le budget ne prévoie « aucune mesure pour régler la négociation des conventions collectives dans le réseau de la santé et des services sociaux alors qu’elle stagne depuis plus de 16 mois ». « Encore une fois, ce sont les femmes, les grandes perdantes de ce budget », indique Laure Letarte-Lavoie, quatrième vice-présidente de l’APTS.

À la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN), on estime que le budget en est un d’austérité. Son président, Jeff Begley, indique que « 1,63 milliard servira à financer les coûts de système au lieu du 1,97 nécessaire ». « Il y a un manque à gagner », dit-il.

Combien ?

1,3 milliard sur 5 ans

264,2 millions en 2021

Pour rehausser les soins et services en santé