Malgré la pandémie et l’incertitude économique qu’elle génère, l’économie vient au 4e rang des priorités des Canadiens, derrière les inégalités de revenus, l’environnement et la discrimination, selon un sondage dont les commanditaires lancent un message aux entreprises : il faut cesser de penser uniquement aux actionnaires.

« Ça ne me surprend pas qu’il y ait plusieurs Canadiens et Canadiennes qui veulent voir des changements et des réformes dans le système capitaliste », note Brian Gallant, ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick, mais surtout président du Centre canadien pour la mission de l’entreprise, à l’origine du sondage.

« Mais quand même, que 55 %, la majorité, aient choisi de répondre qu’ils aimeraient un système économique plus équitable, plus inclusif et plus durable, ça m’a surpris, parce que le chiffre est quand même important. »

Le Centre canadien pour la mission de l’entreprise a été mis sur pied en juillet dernier par la firme de relations publiques Navigator. Ses experts proviennent notamment des milieux libéraux et conservateurs et il compte se financer en réalisant des mandats de consultation auprès d’entreprises.

Les résultats du sondage qu’il a commandé donnent déjà une bonne indication du genre de conseils que fournira le Centre, indique M. Gallant.

PHOTO JAMES WEST, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Brian Gallant, ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick et président du Centre canadien pour la mission de l’entreprise

Si je devais donner des conseils à des entreprises qui voient [ces résultats], je leur dirais qu’il y a clairement des avantages à augmenter leur contribution sociale. elles vont avoir des employés passionnés, ce qui va aider à la rétention. Mais aussi, elles vont contribuer à éviter une situation où le public exerce suffisamment de pression sur le gouvernement pour que celui-ci adopte des règlements pour les forcer à contribuer davantage.

Brian Gallant, ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick et président du Centre canadien pour la mission de l’entreprise

M. Gallant appuie ces recommandations sur les réponses à deux questions du sondage : 56 % des répondants se sont dits prêts à accepter un salaire moindre pour travailler dans une entreprise où les diverses parties prenantes sont considérées sur le même plan que les actionnaires, et 65 % croient que le gouvernement devrait imposer cette considération équitable.

Cela dit, il y a selon M. Gallant beaucoup d’espace à occuper pour les entreprises. À peine 7 % des répondants sont soit « fortement d’accord » ou « fortement en désaccord » avec un énoncé voulant que les entreprises canadiennes prennent déjà en considération les parties prenantes autres que leurs actionnaires.

« En campagne électorale, on dirait qu’il y a beaucoup d’indécis. Les entreprises pourraient mieux communiquer ce qu’elles font déjà, et peut-être que le public serait plus d’accord [avec elles]. »

Le Québec distinct

À une question ouverte leur demandant ce qu’ils considéraient comme le principal défi auquel le monde est actuellement confronté, 50 % des Canadiens ont fourni une réponse classée comme faisant allusion aux inégalités de revenus (28 %) ou à la discrimination (22 %).

Le total est en réalité supérieur à 50 % dans toutes les provinces canadiennes, sauf une : le Québec, où il n’atteint que 38 %.

Pour les Québécois, c’est l’environnement qui est prioritaire (34 %), loin devant les inégalités de revenus (21 %) et la discrimination (17 %).

Le sondage ne s’est pas penché sur les causes, mais M. Gallant n’exclut pas que les réponses reflètent la plus grande influence de la culture américaine, à laquelle ces deux causes sont plus souvent associées, dans les provinces anglophones.

« On pourrait aussi regarder un autre aspect, poursuit-il. Est-ce que le Québec a peut-être plus de programmes qui abordent les inégalités ? […] Mais je ne peux pas insister assez sur le fait que les Québécois sont préoccupés autant que le reste du pays par ces enjeux, c’est juste qu’ils sont beaucoup plus préoccupés par l’environnement. »