Elles avaient un plan, des objectifs précis. Quelques années plus tard, ont-elles rempli leur mission ? Cette semaine, La Presse revient sur les ambitions de quatre grandes entreprises québécoises.

Depuis cinq ans, Hydro-Québec tente de se réinventer. Une équipe de direction complètement renouvelée a fait le constat que si rien n’est fait, le potentiel de croissance de l’entreprise est limité. Un coup de barre a été annoncé. Mais les changements promis tardent à se concrétiser au sein de la plus importante et la plus rentable des sociétés d’État.

Le point de départ

En plein cœur de l’hiver 2015, le président-directeur général d’Hydro-Québec, Thierry Vandal, annonce qu’il quitte prématurément les fonctions qu’il occupe depuis 10 ans. Son successeur nommé le 6 juillet suivant, Éric Martel, hérite d’une organisation aux revenus stagnants et à la réputation ternie par des années de gestion opaque.

L’ancien dirigeant de Bombardier Aéronautique n’arrive pas seul. Il nommera trois de ses anciens collègues de Bombardier aux postes les plus importants de la hiérarchie. David Murray, président de la division Production, Éric Filion, président de la division Distribution, et Marc Boucher, président de la division TransÉnergie, arrivent tous de Bombardier.

L’objectif

Éric Martel promet d’être plus transparent et d’augmenter la satisfaction de la clientèle. Il s’engage à limiter les prochaines hausses de tarifs à des niveaux raisonnables, après deux hausses consécutives de 4,3 % et 2,9 % qui avaient été difficiles à avaler pour les consommateurs.

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Éric Martel, PDG d’Hydro-Québec

Enfin, le nouveau PDG promet de doubler les revenus d’Hydro-Québec, notamment en augmentant les exportations et en faisant des acquisitions à l’étranger.

Le parcours

Presque cinq années plus tard, force est de constater que le virage promis n’est que très partiellement amorcé, notamment sur le plan financier.

Les engagements concernant l’amélioration de la satisfaction de la clientèle ont donné des résultats. Le taux de satisfaction de la clientèle est passé de 82 % en 2015 à 93 % en 2018, selon les chiffres les plus récents fournis par Hydro-Québec. Les hausses de tarifs ont été inférieures ou équivalentes au taux d’inflation depuis 2015.

L’engagement à doubler les revenus a été abandonné. Hydro-Québec pensait faire passer ses revenus annuels de 13 milliards en 2016 à 27 milliards en 2030.

« C’était très ambitieux, compte tenu des barrières existantes sur les marchés de l’énergie », commente Jean-Pierre Finet, directeur général du Conseil québécois des entreprises en efficacité énergétique. M. Finet, qui a répondu aux questions de La Presse, connaît bien Hydro-Québec pour y avoir travaillé.

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Le marché étranger ne semble plus aussi prometteur. Aucune nouvelle route ne permet à Hydro-Québec d’augmenter de façon substantielle ses exportations.

Le fait est qu’Hydro-Québec est encore confinée au territoire québécois. Northern Pass, un des projets de ligne de transport sur lesquels Hydro comptait pour accroître ses exportations, a été torpillé par ses opposants au New Hampshire. Un autre projet de ligne de transport qui passerait à travers le Maine, New England, est fortement contesté et pourrait bien être abandonné également.

Aucune nouvelle route ne permet donc à Hydro-Québec d’augmenter de façon substantielle ses exportations. Les exportations nettes ont augmenté, mais uniquement sur le marché au comptant (spot), où les prix sont en forte baisse.

De même, aucune acquisition à l’étranger n’a été réalisée par la société d’État, malgré la création d’une nouvelle vice-présidence dédiée à la diversification internationale et presque cinq ans de recherche. Cet objectif demeure, a indiqué récemment le PDG Éric Martel. À suivre.

Aujourd’hui

Plutôt que de chercher à doubler ses revenus, Hydro-Québec parle maintenant de doubler ses profits annuels, de 2,8 milliards actuellement, à 5,2 milliards en 2030. Et cette augmentation de la rentabilité viendra surtout du marché québécois, où Hydro veut se tailler une plus grande place. L’objectif est d’augmenter la rentabilité en électrifiant les transports et autres activités industrielles alimentées à l’énergie fossile et en gérant mieux la consommation de pointe critique en hiver. C’est une avenue qui a plus de potentiel que les exportations, selon Jean-Pierre Finet.