Direction du développement durable, projet d'agriculture urbaine à HEC Montréal, cours sur la décroissance soutenable: partout, dans les discussions sur le côté «social» de la populaire école de gestion de la métropole, le nom d'Esdras Minville est évoqué.

Économiste engagé, Esdras Minville a étudié et enseigné aux Hautes études commerciales avant de diriger l'école de 1938 à 1962. À cette époque, les étudiants qui entraient à HEC avaient un cours classique en poche, les cégeps n'ayant été créés qu'en 1967. «Il fallait donc qu'on enseigne les sciences sociales, rappelle Jean-Pierre Dupuis, qui est responsable de l'option Études organisationnelles. Il y a toujours eu des professeurs formés en sciences humaines, et il en est resté un fond.»

Le libéralisme «a décapité» l'homme d'affaires

Les réflexions et ses actions d'Esdras Minville ont surtout porté sur les questions économiques et sociales. Dans son texte Le chef d'entreprise, publié en 1953, le Gaspésien d'origine écrit que le libéralisme «a décapité» l'homme d'affaires, le relevant du même coup de la responsabilité d'assumer «la pleine responsabilité de ses actes», car il l'a transformé en «simple rouage dans une mécanique dont le contrôle n'est situé nulle part».

Fier Canadien français, Esdras Minville a notamment été signataire de la commission Tremblay, sur les problèmes constitutionnels. Il s'est éteint le 9 décembre 1975, laissant derrière lui de nombreux articles et essais. «L'homme d'affaires moderne doit, et de plus en plus, être un homme de culture, capable de s'élever à la hauteur des problèmes difficiles que la pratique des affaires soulève et dont la paix et la prospérité sociales exigent la solution», écrivait-il déjà en 1953.

La relève

Aujourd'hui, la tradition se poursuit, même dans la marginalité. «HEC a toujours été progressiste», estime le directeur du développement durable à HEC Montréal, Jean-Pierre Fortin, en mentionnant Esdras Minville à son tour.

L'homme dont le mandat consiste à veiller à ce que l'école, par ses pratiques de gestion, ses enseignements, sa recherche et ses relations avec la communauté, contribue à la promotion des valeurs véhiculées par le concept de développement durable, ne s'inquiète pas de voir l'un des projets devenir réalité. «On veut lancer l'agriculture urbaine à HEC. Ça se promène dans les échelons hiérarchiques actuellement, mais ça va se faire», affirme Jean-Pierre Fortin.