Google se lance à l'assaut du marché publicitaire québécois. Triplant la superficie de ses bureaux au centre-ville de Montréal, le géant californien vient d'embaucher un Québécois en exil aux États-Unis depuis 15 ans pour diriger la quarantaine d'employés de Google Québec.

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Bien sûr, Nicolas Darveau-Garneau a comme mandat d'augmenter les ventes de publicité de Google au Québec - un chiffre que l'entreprise ne dévoile pas publiquement. Mais le nouveau directeur général de Google Québec plaide surtout pour une plus grande présence des entreprises québécoises sur le web. «Le web n'est pas juste pour les entreprises qui y font des affaires, dit Nicolas Darveau-Garneau en entrevue à La Presse Affaires. Les études montrent qu'entre 70% à 80% des gens font une recherche sur l'internet avant d'acheter une voiture ou d'aller au resto. Moins de la moitié des 2 millions d'entreprises au pays ont un site web. Toute entreprise, grande ou petite, doit être sur le web.»

En poste depuis trois semaines, cet entrepreneur web et ange investisseur ayant passé les six dernières années de sa vie à Silicon Valley a vite réalisé l'ampleur du défi qui l'attend. «La semaine dernière, je cherchais un nettoyeur à sec au centre-ville, raconte Nicolas Darveau-Garneau. Aucun résultat n'est apparu sur mon téléphone Android, mais j'ai croisé trois nettoyeurs à proximité. Parfois, ton consommateur te cherche et ne demande qu'à te trouver sur le web.»

Le nouveau directeur général de Google Québec se réjouit de l'accueil enthousiaste qu'il a reçu du milieu publicitaire. «Il y a une demande des entreprises de travailler ensemble. Les entreprises québécoises vont changer et s'adapter rapidement», dit Nicolas Darveau-Garneau, qui a prononcé la semaine dernière une conférence à l'Association des agences de publicité du Québec (AAPQ). «Google représente un acteur important pour nous aider à prédire le futur de la communication», dit Yanik Deschênes, PDG de l'AAPQ.

Pour attirer davantage d'annonceurs québécois sur Google, Nicolas Darveau-Garneau ne veut pas mettre en place une imposante équipe de ventes. «Nous voulons travailler avec les gens du milieu, avec les agences de publicité. Nous n'avons pas les ressources pour faire ça nous-mêmes et ce n'est pas notre mandat de toute façon. Nous voulons faire de l'éducation et de l'aide stratégique», dit Nicolas Darveau-Garneau. Depuis 2009, le bureau montréalais de Google était dirigé par Shibl Mourad, un ingénieur qui supervise toujours les employés affectés notamment à développer des applications d'achat en ligne sur le navigateur web Google Chrome.

En 2010, la publicité en ligne a devancé les quotidiens imprimés au deuxième rang des médias publicitaires au pays, selon le Bureau de la publicité interactive du Canada. «La tarte va grandir pour tout le monde, dit Nicolas Darveau-Garneau. Mon travail n'est pas de convaincre les entreprises de dépenser tout leur argent sur Google. Sauf que les résultats d'une publicité sur le web sont plus évidents à quantifier que ceux d'une annonce sur un autobus. Avec la publicité en ligne, on peut voir les résultats immédiatement.»

Pionnier de la musique en ligne

Dans son ancienne vie d'entrepreneur web, Nicolas Darveau-Garneau a fait face au même dilemme que les entreprises québécoises aujourd'hui. Après ses années comme consultant chez McKinsey où il a côtoyé le directeur financier de Google Patrick Pichette, le Chicoutimien élevé à Montréal a fondé imix.com, une entreprise new-yorkaise qui gravait en toute légalité des chansons de différents artistes sur un même CD. «On avait 50 000 chansons, mais pas toujours des bonnes», dit-il en riant. Rapidement, imix.com a offert de télécharger des listes de chansons sur le web. Une sorte de précurseur d'iTunes, le service de musique lancé par Apple en 2001. Cette année-là, alors que l'industrie de la musique en ligne est sur le point d'exploser, Nicolas Darveau-Garneau vend imix.com. «Les gens qui sont là les premiers ne sont pas toujours ceux qui bénéficient de la vague, dit-il. Et puis quand on sait qu'on ne sera pas numéro un ou deux...»

Il devient analyste boursier chez Sanford Bernstein à Wall Street avant de réaliser son rêve de s'établir à Silicon Valley, où il devient ange financier et mentor chez les entreprises en démarrage comme Fixya et Liquor.com. Après 15 ans d'exil aux États-Unis, le gestionnaire de 43 ans revient dans une ville qui a changé en mieux. «Je suis très impressionné, car le milieu de l'innovation à Montréal est plus dynamique que dans mes souvenirs, dit-il. Il y a beaucoup d'entrepreneurs, d'idées et de capital de risque. C'est à moi d'avoir mes antennes ouvertes, d'être sûr que Google sera le premier à s'intéresser à une entreprise d'ici qui pourrait avoir une idée de 1 milliard de dollars.»