Des lecteurs ont posé des questions aux spécialistes de l’étiquette au travail du New York Times. Voici quelques réponses reçues.

Au retour de sa pause, un de mes collègues dégageait une forte odeur de cannabis. Je n’en ai jamais fumé, alors je ne sais pas grand-chose des nouvelles façons ou techniques de fumer, et je ne suis pas certaine de ce que ça peut sentir ou pas. J’ai bêtement demandé à un collègue s’il pensait que le type en question sentait le cannabis. Sa réponse a été plutôt évasive et il a plus ou moins indiqué que ce n’était pas inhabituel. Il m’a dénoncée au fumeur d’herbe, qui m’a confrontée et m’a dit que si j’avais un problème, j’aurais dû m’adresser directement à lui. J’ai appris depuis que ce comportement est assez habituel chez certains employés. Suis-je naïve et pas cool de penser qu’il est inacceptable de fumer du pot au travail ? – Anonyme

Si vos collègues et vous n’utilisez pas de machinerie lourde, ne conduisez pas de semi-remorques, ne pratiquez pas d’actes médicaux ou ne pilotez pas d’avions, fumer de l’herbe pendant les pauses est malavisé, mais relativement inoffensif. Est-ce professionnel ? Non. Vous n’êtes pas cool parce que ça vous déplaît ? Peut-être ! Mais vous avez le droit à votre opinion, tout comme vos collègues ont le droit de faire ce qu’ils veulent durant leurs pauses. Cela dit, la plupart des employeurs interdisent la consommation de substances intoxicantes au travail. Vos collègues enfreignent probablement les règles, mais vous n’avez pas à vous en préoccuper. Laissez tomber.

Indispensable, mais enceinte

Je gère les données d’une petite entreprise, une tâche quotidienne cruciale, et personne d’autre ne peut faire mon travail au même niveau que moi. Ayant peu de soutien, si je pars en vacances, les dossiers s’empilent et il me faut des semaines à mon retour pour rattraper le retard. Je suis enceinte et mon congé de maternité aura lieu pendant la période la plus chargée de l’année. Je devrais avoir un plan ou des idées sur la manière dont l’entreprise peut gérer mon absence, mais je ne vois pas de solution. Je doute qu’on puisse trouver à court terme un remplaçant pouvant assumer mon rôle avec seulement quelques mois de formation. Je crains qu’on me demande de fractionner mon congé de maternité ou de travailler à temps partiel pour continuer à gérer la charge de travail. Que dois-je à mon entreprise dans ces circonstances ? Je suis l’une des rares femmes à y travailler, l’entreprise n’a jamais eu à gérer de congé de maternité dans le passé et il n’y a pas de service des ressources humaines. Comment dois-je aborder la question avec mes patrons ? Comment puis-je atténuer les conséquences de mon absence ? – Anonyme

Félicitations pour l’heureux évènement attendu. Aidez l’entreprise à trouver un remplaçant. Les congés parentaux sont une pratique courante dans les entreprises [et c’est la loi au Québec]. Il est évident que vous êtes formidable dans votre travail, mais vous n’êtes pas la seule personne au monde qui peut empêcher la firme d’imploser. Et si c’est vraiment le cas, vous n’êtes pas assez bien payée ! Quand vous parlerez aux propriétaires, ayez un plan précis en tête concernant le type de personne qu’ils doivent trouver, la durée de son mandat et la manière dont vous l’intégrerez. Vous ne devriez pas avoir à fractionner vos congés ou à travailler à temps partiel : dans l’expression « congé de maternité », il y a le mot « congé » ! Soyez ferme sur ce point, tant avec vous-même qu’avec votre employeur.

Comment quitter une patronne cinglée ?

Je suis l’adjointe à la direction d’une personne qui possède plusieurs maisons et une petite entreprise très active. Je travaille chez elle depuis 14 mois. Ma patronne est très soupe au lait – la moindre contrariété la fait disjoncter et elle rejette la faute sur autrui. Je dois constamment refaire du travail parce qu’elle ne planifie jamais la manière dont elle veut atteindre ses objectifs et qu’elle formule mal ses attentes. En outre, elle semble rancunière ; elle parle sans cesse de ses anciens partenaires commerciaux et d’anciennes employées qui sont tombées enceintes quand elles travaillaient pour elle. Ceux qui n’adhèrent pas d’emblée à ses idées sont des « idiots ». Ça crée un stress et une charge de travail presque ingérables. J’ai décidé de partir – c’est un lieu de travail malsain, toxique, sans avancement et sans RH pour servir de médiateur. J’ai la chance de ne pas avoir à trouver un autre emploi avant de quitter celui-ci. Comment démissionner lorsque votre patronne a des problèmes émotionnels et mentaux évidents ? – Anonyme

Il suffit de donner un préavis de deux semaines, d’organiser une transition en douceur et de passer à autre chose dans votre vie professionnelle, en espérant trouver une situation saine. Vous n’êtes pas responsable de la santé mentale ou du bien-être émotionnel de votre patronne. Elle s’en sortira, je vous l’assure.

Conciliation travail-famille

Je suis une professionnelle à l’aube de la quarantaine, je suis célibataire et sans enfant, par choix. Ma patronne a le même âge et est la mère célibataire d’un enfant d’âge préscolaire. Nous avons le même niveau d’éducation et de compétence, mais elle a commencé des années avant moi et est ma supérieure dans l’entreprise. En vérité, elle s’occupe à temps partiel d’un emploi à temps complet. Je lui en veux de plus en plus de travailler beaucoup moins que moi pour un meilleur salaire. Tout le monde ici est en télétravail. Elle se connecte vers 9 h 30 ou 10 h à son retour de la garderie et se débranche à 16 h 30 pour aller chercher le petit. Elle ne travaille ni le soir ni le week-end. Si son fils est à la maison pendant la journée – pendant les vacances, lorsqu’il est malade, pendant les confinements de COVID –, ma patronne peut à peine travailler. Ses horaires limités et ses nombreuses distractions ne rendent pas mon travail impossible, mais ils ajoutent indéniablement des défis ; elle est le goulot d’étranglement dans l’avancement des projets. Je ne pense pas que les femmes devraient sacrifier la maternité à leur carrière, mais je suis aigrie de constater que j’accorde plus d’importance au travail que ma patronne. Y a-t-il une autre façon de recadrer cette situation pour moi qui allégerait le ressentiment et la culpabilité que je ressens à propos de mon manque de solidarité envers les femmes ? – Anonyme

J’ai une question : êtes-vous sûre qu’elle travaille moins que vous ? Peut-être travaille-t-elle différemment. Pourquoi focalisez-vous sur ses habitudes de travail ? Franchement, il semble que votre patronne ait des limites saines entre vie professionnelle et vie privée. Je pense que le véritable enjeu, c’est votre ressentiment – auquel vous avez droit. Le meilleur recadrage que je puisse vous suggérer est d’arrêter d’être obsédée par les habitudes de travail de votre patronne. C’est vous qui choisissez de donner la priorité au travail. Cela ne signifie pas que vous devez être le patron. Mais je suis certain que votre jour viendra. Et j’espère qu’à ce moment-là, vous vous rendrez compte que la vie ne se résume pas au travail, que nous pouvons être bons dans notre travail sans en faire le centre de notre vie, et que nous avons tous des complications qui influent sur notre vie professionnelle.

Cet article a été publié dans The New York Times.

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