De l’énergie renouvelable, de l’hydrogène et du minerai de fer de grande qualité. Le Canada et le Québec ont tous les ingrédients pour développer la filière de l’acier vert, selon le Boston Consulting Group. Il reste à trouver la recette.

De l’énergie renouvelable

La production d’acier génère 7 % des émissions de carbone dans le monde. Pour s’y attaquer, il faudra des investissements importants, mais aussi des ressources de base que le Canada – le Québec et Terre-Neuve – possède et qui peuvent être mises à profit, selon Simon-Pierre Monette, directeur général et associé de BCG à Montréal.

« Pour l’acier, on pourrait voir la même dynamique que pour le secteur de l’aluminium, qui travaille à réduire ses émissions en utilisant de l’énergie renouvelable pour la production primaire, en modernisant ses procédés (avec la technologie développée par Elysis), et avec un recours accru au recyclage », explique-t-il dans un entretien avec La Presse.

Le Canada, avec les ressources énergétiques du Québec et de Terre-Neuve, peut contribuer à verdir la production d’acier, soit en alimentant directement les aciéries, soit en produisant l’hydrogène vert dont elles ont besoin.

Des technologies éprouvées

Pour réduire l’empreinte carbone de la production d’acier, des technologies éprouvées existent déjà, souligne Simon-Pierre Monette. Les fours à arc électrique, qui remplacent les hauts fourneaux traditionnels, peuvent réduire de 45 % les émissions de l’industrie avec le gaz naturel comme carburant. La réduction peut aller jusqu’à 92 % si le gaz naturel est remplacé par l’hydrogène vert.

Actuellement, seulement 6 % de la production d’acier dans le monde utilise les fours à arc électrique alimentés par du minerai de fer réduit pour la production d’acier primaire. Selon BCG, cette technologie devrait progresser pour atteindre 30 % de la production totale en 2050.

Au Canada, les usines d’Algoma et Dofasco d’ArcelorMittal en Ontario ont annoncé son intention de passer à la technologie des fours à arc avec une aide de 900 millions de dollars des gouvernements fédéral et provincial. L’usine d’ArcelorMittal à Contrecœur utilise les fours à arc électrique.

Une matière première de qualité

Pour produire de l’acier avec des fours à arc électrique, il faut un minerai de qualité, à faible concentration de silice et d’alumine. Ce minerai de qualité est un autre atout du Québec, où le minerai de fer est de grande qualité. « La fosse du Labrador est une zone de choix pour les investissements miniers en faveur de la transition vers l’acier vert », souligne le spécialiste.

En plus de leurs ressources minérales, le Québec et Terre-Neuve ont une richesse hydroélectrique qui peut servir à produire de l’hydrogène vert et à remplacer le gaz naturel dans les procédés.

« Le fer réduit par l’hydrogène pourrait accéder à un important marché de production d’acier au Canada et aux États-Unis, souligne Simon-Pierre Monette. Nous estimons que d’ici 2050, l’adoption de fours à arc en Amérique du Nord pourrait générer jusqu’à deux mégatonnes de demande en hydrogène vert chaque année pour produire du fer réduit par l’hydrogène, une demande qui représente environ 4 milliards de dollars américains. »

Les ingrédients, pas la recette

De l’énergie, de l’hydrogène et du minerai de qualité. Le Canada a tous les ingrédients nécessaires, mais pas encore la recette pour être un leader dans la production et l’exportation d’acier vert, convient Simon-Pierre Monette. « C’est la question de la poule ou l’œuf. On commence par quoi ? »

Le développement d’une chaîne de valeur passe par les partenariats, estime-t-il. Des partenariats entre les producteurs d’énergie, les sociétés minières et les aciéries sont nécessaires. La contribution des gouvernements est aussi essentielle, si on veut un jour pouvoir différencier l’acier vert de l’acier et lui accoler une prime sur le marché des produits de base.

Il est possible de taxer le contenu en carbone des produits à base d’acier, pour favoriser l’acier vert, suggère-t-il. Des cibles de contenu d’acier vert dans le secteur du bâtiment et de l’automobile pourraient aussi avoir un impact important dans le développement d’une filière verte pour l’acier.

Enfin, un apport en capital, peut-être provenant de la Banque d’infrastructures du Canada, suggère-t-il, est indispensable. « La transformation du secteur de l’acier va requérir énormément de capital », insiste-t-il.

Rectificatif
Une version précédente de ce texte indiquait qu’ArcelorMittal n’utilisait pas la technologie des fours à arc électrique à son usine de Contrecœur, au Québec. Or, l’usine utilise bel et bien cette technologie. Nos excuses.